Dans une de mes classes des dernières semaines, un professeur m’a raconté que ses élèves lisaient de moins en moins au fil des années. Il avait bien toujours quelques exceptions, un ou deux gros lecteurs par classe qui ferait mentir ses impressions, mais il constatait que sa bibliothèque de classe n’était pas aussi visitée qu’au début de sa carrière.
Quelques jours plus tard, j’ai profité d’une animation dans la classe d’une amie pour lui poser la question : avait-elle constaté elle aussi une baisse dans les envies de lecture de ses élèves? Sa réponse, et celle de ses collègues ayant entendu ma question: pas du tout! Elles m’ont parlé de la richesse de l’offre qui s’est étoffée avec les années, et m’ont raconté avoir rapporté des livres de la bibliothèque plus tard que la veille, qui avaient trouvé preneur à une vitesse record. Une des professeurs a ajouté un bémol: “Ils sont réfractaires aux vieux livres”. Je dois avouer que c’est quelque chose que j’ai vécu avec mes propres enfants. On dirait que les jeunes ont un radar à “vieux livres” qui disqualifie ceux-ci automatiquement de leur liste d’intérêt. Même mes bandes dessinées d’enfance, gardées précieusement, ont été peu lues par mes enfants, pourtant bédéphiles.
À la lumière de ces infos, j’ai repensé au premier professeur. Sur le bureau de chacun de ses élèves se trouvait le livre “Le bizarre incident du chien pendant la nuit”, clairement leur lecture obligatoire du moment. Un très bon livre dont j’ai applaudi la sélection sur le coup… mais à bien y réfléchir, écrit pour les adultes et publié il y a près de 20 ans (2003). Je n’ai pas vu la bibliothèque de sa classe, mais avec le recul, je ne peux que me demander s’il y avait longtemps qu’il n’avait pas renouvelé les livres qui s’y trouvaient, ce qui pourrait expliquer le manque d’enthousiasme des élèves. *
Je me suis aussi rappelé la professeure de maternelle de mes enfants, qui expliquait aux parents que son véritable rôle était d’amener les enfants à aimer l’école. Dans le fond, côté lecture au primaire, le véritable rôle des professeurs n’est-il pas de leur faire aimer la lecture de prime abord? Les jeunes auront bien assez du reste de leur parcours pour apprendre à apprécier la littérature plus costaude et les grands classiques.
Remarquez, si j’en juge le peu d’enthousiasme de mon cégépien envers sa lecture obligatoire de Balzac, ce n’est pas gagné d’avance!!!
* J’en profite pour rappeler à ceux qui ont des enfants au primaire que les livres jeunesses font d’excellents cadeaux de Noël pour les professeurs!