À la fin mars, pour la première fois de ma carrière, je demanderai une bourse aux conseils des arts du Québec et du Canada. Comme conceptrice interactive, j’en ai demandé des dizaines, toujours pour des entités corporatives, habituellement pour des projets basés sur des univers d’un tiers client. Je les ai souvent obtenus, mais parfois en me disant que je n’aurais pas du…
Je m’explique.
Pour moi, les bourses de création (ou de production) doivent servir à la culture québécoise. J’ai aidé LVLStudio à aller cherche une bourse interactive qui a permis de faire le un jeu web pour la série télé 19-2. Merveilleux! Par contre, j’ai également déjà aidé une autre compagnie à aller chercher des fonds pour faire un jeu basé sur une série de télé-réalité américaine. Hein? Pourquoi? On peut facilement penser que ladite série américaine a assez de sous pour se payer le jeu à même leur poche, ou encore que le nom de la série permettra assez de ventes pour aller chercher les fonds en prêts, ou en « angel », non? Et si les fonds permettent aux compagnies canadiennes de se former une expertise, pourquoi ne pas leur donner l’argent pour créer des propriétés originales à la place?
À cause de ce passé, dans mon esprit, la subvention devrait servir à la culture locale, et j’ose espérer que les Conseils des Arts ne donnent pas de sous pour financer des livres sur les princesses de Disney! Selon moi (et c’est là que je suis peut-être un peu extrême) les subventions de création ne devraient même pas être données à un projet qui à toutes les chances d’être viable commercialement. Donnez-lui plutôt une subvention pour le sortir des frontières du Québec, ça sera plus profitable pour tous!
Bref, je demande cette fois-ci une bourse parce que je suis habitée depuis un an par un projet parfaitement non viable commercialement! Plus littéraire et atmosphérique que tout ce que j’ai écrit jusqu’ici, je ne suis même pas certaine de pouvoir lui attribuer un public cible. J’y troque l’action pour le psychologique; vous n’y trouverez pas l’ombre d’un combat ou d’une poursuite. Il ne fera partie d’aucune collection ou série déjà établie. Le risque est énorme.
Étrangement, j’ai plus peur de ne pas avoir la bourse que lorsque je pouvais apposer à ma demande un magnifique logo américain. Avec un peu de chance, les subventions littéraires ont différents critères que les interactives
Je crois que la philosophie derrière les bourses de création n’est pas d’encourager les projets qui seraient non viables commercialement, mais plutôt d’encourager la production de trucs différents et de qualité, du genre que les grosses machines commerciales produisent peu.
Cela dit, je m’illusionne peut-être…
@Gen: Je me suis possiblement mal exprimé, parce que mon intention était dans le même sens que toi! Par non-commercial, je ne veux pas nécessairement dire « un flop assuré »! On peut être non-commercial parce que différent, parce que poétique, parce qu’artistique, etc.
Oui, je me doute bien que tu ne voulais pas produire volontairement quelque chose d’invendable! 😉
Cela dit, je crois tout l’art de la demande de bourse consiste à montrer pourquoi ce serait vendable, même si différent.
@Gen: Fort joli paradoxe!