Ça fait maintenant quinze ans que je fais des salons du livre, et j’ai remarqué de grands changements non pas dans les salons eux-mêmes (changent-ils vraiment?), mais dans ce que j’en attends et en retire.
Au tout début : la vente à tout prix.
Jeune autrice absolument inconnue, les salons étaient le seul endroit qui me donnait une impression de contrôle sur les ventes du livre une fois celui-ci publié. J’ai carburé à la vente, prenant chaque nouveau lecteur comme une marche vers le succès, multipliant les heures avec l’impression que c’est nécessaire pour réussir.
J’ai d’ailleurs retrouvé ce billet de 2010 dans lequel j’en parle.
Cette pression de la vente est stressante, épuisante, euphorisante lorsque les choses vont bien… et désespérante les jours où ça ne marche pas.
Trois ans plus tard, épiphanie lors de la lecture d’un billet de blogue de Mylène Gilbert-Dumas : j’ai compris que ça ne faisait aucun sens, et je suis passé à la phase d’après.
Deuxième phase : la validation personnelle
Libérée du stress de la vente à tout prix, et avec de plus de titres publiés à mon actif, je me suis mise à apprécier les salons.
Il suffisait alors qu’un enfant s’arrête devant ma table tout content d’apprendre qu’il y a une suite au roman qu’il a aimé, qu’un professeur passe raconter une anecdote survenue alors qu’elle lisait le livre en classe ou qu’un lecteur amène un livre de la maison pour le faire signer pour que je quitte le salon avec l’impression que ça en avait valu la peine.
Pourtant, je restais envieuse des files d’attente des autres, et facilement découragée par une heures passée seule à ma table. Avec le recul, je réalise que les salons me servaient alors de validation personnelle, de preuve que mes livres existent à l’extérieur de moi. C’est très rassurant, pour un auteur, de se savoir lu.
Puis, j’ai atteint ce point confortable dans ma carrière qui me donne l’impression de ne plus rien avoir à prouver, ni aux autres ni à moi-même. C’est alors que les salons deviennent…
Maintenant : du pur bonheur
Voilà où j’en suis, enfin, après 15 ans de salons. J’accueille autant les heures creuses que les heures achalandées, autant les discussions que les longs silences à observer la foule. Je profite simplement du plaisir de faire partie de cette grande fête autour de la lecture.
J’ai des chiffres de ventes qui me rappellent que mes livres marchent bien même si je n’ai pas vendu un seul exemplaire de la journée. J’ai juste assez de lecteurs qui viennent me voir avec un livre apporté exprès de la maison pour que je n’aie pas à m’inquiéter d’être venue pour rien.
J’ai atteint la zénitude de Salon.
J’étais donc doublement déçue de devoir mettre fin à mon salon du livre de Montréal pour cause de maladie après deux jours de présence seulement sur les quatre prévus.
Je pense que je vais me reprendre en prévoyant une journée supplémentaire à celui de Québec! Pas pour des raisons marketing, mais bien pour mon plaisir personnel!