Récemment, j’ai dû cacher le dernier tome d’une de mes séries de bandes dessinées préférées dans un tiroir, afin de m’assurer que mes enfants ne me demandent plus jamais de le lire.
La série : Petit poilu, un petit bijou de bande dessinée sans paroles.
L’album : le tome treize : le château de crotte de maille.
La trahison de l’auteur
Tout d’abord, il faut savoir que les douze premiers Petit Poilus suivent les aventures colorées d’un petit bonhomme qui s’aventure hors du foyer familial pour découvrir à chaque fois un monde merveilleux. C’est une des séries qui a le plus accroché mon garçon à la lecture, et je le recommande chaudement à gauche et à droite depuis des années! Sans paroles, la bande dessinée permet aux enfants de 3-5 ans de lire seuls en se racontant l’histoire. Les douze premiers tomes offrent des trésors d’aventure, d’amitié et de poésie. Le treizième n’offre que du caca!
Et je ne parle pas ici au figuré!
Voici quelques cases de l’album, puisqu’une image vaut mille mots.
On devine facilement la suite: le contenu de la catapulte sera envoyé sur la tête du « vilain » pour le faire fuir.
Les lecteurs de longue date savent déjà que, à la base, je ne suis pas adepte d’utiliser l’humour anal pour accrocher les lecteurs. D’un autre côté, j’accepte sa présence dans la littérature jeunesse, entre autres parce que c’est vrai que certains enfants peuvent y trouver son compte, et surtout parce qu’il n’y a pas de mauvais chemin vers la lecture.
Le problème, c’est que quand on instaure un ton dans une série, on ne peut en déroger de manière trop brutale sans trahir son auditoire. Petit Poilu qui passe de la poésie à la vulgarité, c’est un peu comme si Peyo avait donné, l’espace d’un album, une tronçonneuse à Gargamel pour quelques scènes de bain de sang bien senties! Ça ne veut pas dire que les scènes sanglantes sont mauvaises en générales, par exemple, elles sont tout à fait convenables (et même plutôt agréables) lorsque lues dans un Clown vengeur.
Une série établie des attentes entre le lecteur et l’auteur. Si l’auteur a envie de se défouler dans une tout autre direction, il doit le faire dans une autre œuvre! Par exemple, lorsque Zep, l’auteur de Titeuf, a eu envie de faire une BD plus sérieuse, il l’a fait dans un album qui n’a rien à voir avec son héros habituel.
Le pire, c’est que le format, lui, peut changer sans que ça ne soit une trahison. Prenez par exemple Léon, qui se décline en albums de toute sorte, tout en restant toujours aussi rigolo.
Même moi, avec le tome 5 de Victor, je change la formule le temps d’un recueil de nouvelles. Mais là encore, le ton, lui sera respecté.
Bref, liberté dans la forme, continuité dans le ton.