Archives de catégorie : Réflexions

Extrait de Paul Thibault

Plus qu’une semaine et demie avant la sortie de La légende de Paul Thibault! Ça fait des mois et des mois que je vous parle de mon écriture en rime de ce manuscrit, voilà l’occasion de constater le résultat par vous-même!

J’ai choisi un extrait de la première des trois histoires comprises dans l’album, soit la rencontre entre Paul et la terrible épinette à tentacule.

Note de lecture : Oubliez vos règles d’alexandrins classiques! L’idée est d’adapter certaines syllabes et contractions pour trouver votre propre rythme, un peu comme les chanteurs le font.

L’épinette à tentacule
(Illustration de Sans Cravate)

Cet arbre maudit aux rameaux menaçants
terrorise les bêtes des grandes forêts d’antan,
Il attaque les loups, les renards, les oiseaux.
Même les grands ours bruns n’y frottent pas leur dos.

Paul braque ses deux yeux dans ceux du conifère,
bombe son torse poilu et dit d’une voix fière :
« Je te défie au combat! Si tu en sors perdant,
tu nous laisseras tranquilles jusqu’à la fin des temps. »

L’arbre se met à rire, secouant ses épines.
Il traite Paul de têtard, de puceron, de vermine!
Acceptant le défi, il lui répond sans frousse :
« Si je gagne, c’est promis, je vous mangerai tous! »

Analyse de trois narrateurs

On a parfois l’impression qu’une narration à la troisième personne est obligatoirement neutre et doit s’effacer au profit de l’histoire. Voici pourtant trois lectures récentes qui offrent de belles opportunités d’utiliser le narrateur pour donner plus de personnalité au récit.

La tour sombre, Stephen King :

Je suis en train de terminer la Tour sombre de Stephen King. Cette série se passe (en partie) dans un autre monde, avec se codes, ses expressions et son langage. Jusque-là, rien de bien spécial puisque la plupart des livres issus des littératures de l’imaginaire suivent ces mêmes règles. La différence, c’est que les expressions colorées sont également utilisées par le narrateur, plutôt que d’être confinés au dialogues. Le narrateur, omniscient et à la troisième personne, va donc se permettre des « Say Thankya »  ou autre expression de l’autre monde, nous donnant l’impression non seulement que l’aventure s’y déroule, mais que le narrateur lui-même en fait partie. Une belle touche.

Le joueur d’échecs, Stefan Zweig  :

Pour celui-ci, ce n’est rien de neuf, puisqu’il s’agit d’un narrateur-témoin, donc un personnage secondaire de l’histoire, qui observe le héros et rapporte ses gestes. On trouve la même sorte de narrateur dans Don Quichotte (Sancho Pansa), Sherlock Holmes (Watson) et même Moby Dick (Ishmahel). Pourtant, c’est un procédé beaucoup que j’ai rarement vu en littérature jeunesse. Je suis donc bien titillée à l’idée de m’y essayer moi-même, me disant que ça serait une belle manière d’introduire un héros adulte tout en gardant une touche jeunesse!

La voleuse de livres :

Autre coup de génie : le narrateur de ce classique n’est nul autre que la mort. On parle donc ici d’un narrateur témoin, comme dans le joueur d’échecs, mais son identité lui permet d’être également omniscient, puisque c’est une sorte de dieu!  Le narrateur se permet donc des apartés, des digressions, tout en étant omniscient. Le meilleur des deux mondes.

 

Pour des narrateurs 3e personnes intéressants en littérature jeunesse, regardez du côté de Songe à la douceur de Clémentine Beauvais ou de Desastruses aventures des orphelins Baudelaire de Lemony Snicket!

 

La légende de Paul… Provencher!?

La légende de Paul Thibault sort dans moins d’un mois, et j’ai eu envie de vous parler un peu des inspirations derrière ce livre. Il y en a deux! Pour la forme en vers, l’inspiration vient du livre The Hunting of the Snark de Lewis Caroll, illustré par Tove Jansson, dont je vous avais déjà parlé ici.

Pour le thème, ma récente obsession pour les coureurs des bois vient du fait que mon mari (et donc, mes enfants par défaut) compte dans son arbre généalogique celui que l’on appelle « le dernier coureur des bois », Paul Provencher.

Paul Provencher était ingénieur en foresterie dans les années 1920, et passera sa vie à explorer et documenter les grands espaces isolés du Québec, notamment les forêts de la Côte-Nord. Ne pensez pas qu’il s’agit simplement d’une petite légende familiale! Il a écrit plusieurs livres, une collection de musée porte son nom, deux films ont été faits sur sa vie, et nous avons même eu la surprise de trouver un article parlant de lui dans un vieux magazine Tintin!

Un véritable héros québécois.

C’est donc par cet ancêtre indirect de mes enfants que m’est venue l’envie d’écrire un livre de coureur des bois. Pourtant, je ne voulais pas écrire un livre historique! Je désirais, au contraire, faire entrer cette figure héroïque dans le domaine du mythique. Je me disais : « l’Europe a ses chevaliers, le Japon ses samouraïs… au Québec nous avons des coureurs des bois ». Et plus j’y pensais, plus je trouvais ces derniers sous-exploités dans notre littérature.

J’ai donc créé mon propre héros. Je l’ai prénommé Paul en l’honneur de ma source d’inspiration. Je lui ai donné une passion pour le tricot pour l’éloigner des clichés de virilité. Je l’ai fait végétarien pour bien montrer que, dans le domaine du mythique, tout est permis. Finalement je l’ai installé dans une forêt boréale magique, peuplée d’épinettes à tentacules et de golems de feuilles mortes pour l’auréoler d’un imaginaire bien de chez nous.

J’aimerais que l’on trouve, un jour, au Québec, autant de livres de coureurs des bois de toutes sortes que l’on trouve, en Europe de livres de chevaliers!

Pour le reste, toute ressemblance avec des personnes existantes ou ayant existé est purement fortuite, je le jure!

Les derniers refus en bouquets!

Histoire que je ne m’enfle pas la tête après le billet de la semaine dernière, parlons refus! Parce que oui, je continue d’en recevoir, à la pelle, même après tout ce temps!

En ce moment, j’ai un seul manuscrit à placer, soit un premier roman d’une série d’aventure fantastique pour les 10 ans et plus, dans la lignée de Victor Cordi. Voici, jusqu’ici et dans le désordre, les raisons pour lesquels les éditeurs à qui je l’ai envoyé n’en veulent pas :

  • On se concentre désormais sur un public cible plus adolescent
  • On n’a plus de place pour les nouveaux auteurs ces temps-ci
  • On ne fait plus de fantastiques
  • On ne fait plus de séries

Et mon préféré :

  • On adorerait travailler avec toi… Reviens nous voir quand tu auras une idée plus terre à terre (sous-entendu : moins bizarre).

Sans compter, évidemment, ceux qui ne me redonnent simplement pas de nouvelles!

Bref, même après quinze ans, ce n’est pas devenu magiquement facile!

Ne vous en faites pas, j’ai assez de métier pour savoir que mon manuscrit finira par trouver sa place! Il suffit d’un peu de patience! En attendant, j’ai une bien excitante rentrée littéraire pour m’occuper!

 

 

Être étudiée à l’école

Je suis dans un métier pour lequel l’avancement de la carrière est quelque chose de plutôt flou! Pas de changement de titre sur les cartes d’affaire, pas d’évaluation annuelle, pas de promotions… même au niveau du salaire, il n’y a que des hausses éphémères.

Pourtant, certains événements marquent notre parcours. Cette année, je fais mon entrée dans les livres scolaires.

Non pas avec un texte, comme ça m’était arrivé avec les premières pages de Victor Cordi, mais bien avec mon nom, ma face, et l’ensemble de mes livres.

C’est fou!

Les éditions Pearson ERPI ont lancé une nouvelle gamme de cahiers d’école, appelés DUO, qui permettent d’enseigner tout le programme de français du 2e cycle en mettant l’accent sur la littérature jeunesse. Pour chacun des niveaux scolaires (3e et 4e année), quatre auteurs jeunesse sont présentés.

J’en fais partie. Et ça me fait tout chose.

Il faut dire que les noms avec lesquels je partage cet honneur ne sont pas les moindres. En plus de Valérie Fontaine qui est autrice en résidence sur le projet, on retrouve Alain M.Bergeron, Pierrette Dubé, Émilie Rivard, Rémy Simard, François Gravel, Yvan DeMuy et Mika!

Évidemment, je suis au courant depuis plusieurs mois, puisque les éditions Pearson ERPI m’ont demandé des textes inédits ainsi qu’une vidéo. Pourtant, il a fallu une publication Facebook de Valérie Fontaine, autrice en résidence sur le projet, pour en comprendre l’ampleur. Elle a demandé à son réseau de parents et de professeurs s’il y en avait parmi eux dont les enfants ou les élèves utiliseraient les cahiers Duo cette année. Ils ont été nombreux à lever la main. Très nombreux!

Tous ces gens vont m’étudier à l’école.

Complètement fou.

De la chance d’avoir des salons du livres

J’étais en train de perdre mon temps sur une liste de Bored Panda qui montrait les différents signes de protestations triviaux d’un certain Seth Phillips, mieux connu sous le nom de “Dude with sign”, quand soudain une des pancarte en question a attiré mon attention. 

En français: “faites des salons du livre pour adultes.” 

Je commence par l’incompréhension, du genre “qu’est-ce qu’il veut dire par là?”… pour réaliser la triste vérité: certaines personnes ne connaissent aucun salon du livre autre que ceux organisés dans les écoles primaires (souvent par Scholastic)! 

Et ils sont nombreux! Dans les commentaires sous l’image, on retrouve plusieurs  “Oui, on en veut” des “Ça existe, ça s’appelle des magasins!” et même un “Bonne idée, mais ça ne marchera jamais” (traduction libre).  

Évidemment, quelques personnes, comme moi, sont consternés et demandent plutôt: “Vous n’avez pas de salons du livre aux États-Unis”? 

Parce que, avouons-le, c’est la seule raison possible pour l’existence d’une telle pancarte et de telles réactions: certains coins des États-Unis n’ont pas de salons du livre. Du tout! 

Juste au Québec, qui a une population inférieure à celle du New Jersey, on compte 9 salons importants, auxquels s’ajoutent une dizaine, sinon plus, de petits salons locaux!

Alors, soudain, je réalise notre chance! Notre chance de vivre dans une société pour laquelle les livres sont importants, avec un système de subvention qui permet leur organisation, et surtout, une population tout à fait enthousiaste devant l’idée d’y assister. 

Alors que mon calendrier commence à se remplir de Salons du livre, je me dis que je devrais en profiter encore plus cette année! Non seulement parce que j’en ai peu fait depuis deux ans (voyage et pandémie oblige), mais aussi parce que  je devrais les prendre un peu moins pour acquis.

Le format de Paul Thibault!

Privilège de l’autrice, j’ai déjà reçu mes copies papier de La légende de Paul Thibault, même s’il ne sera en librairie qu’à la fin septembre!

Qu’il est beau!!!

De manière surprenante, il est aussi petit… ou grand, c’est selon! Plus grand qu’ un roman, plus petit qu’un album! C’est un format hybride que les 400 coups déjà ont utilisé pour d’autres livres-ovnis, comme les Fables extravagantes de Conrad le corbeau (Pierrette Dubé, Audray Malo) et Branchez-vous et autres poèmes biscornus (François Gravel, Laurent Pinabel). Les deux sont d’ailleurs fantastiques, gâtez-vous, le 12 août s’en vient!

Voici donc Paul dans toute sa splendeur, avec ma face comme référence de taille!

Pas certaine que la perspective rend bien ce que j’essaie d’expliquer, voici donc plutôt les chiffres : 16,5cm x 23cm, soit à peine plus qu’un Agent Jean (pour nomme quelque chose que la plupart de mes lecteurs ont sous la main!).

C’est intéressant comme format, quand on y pense! Clairement pas fait pour l’heure du conte avec les touts petits, mais parfait pour…

  • La lecture du soir avec des non-lecteurs un peu plus vieux ou des lecteurs débutants
  • La lecture autonome de lecteurs intermédiaires à qui les romans font peur
  • La lecture autonome de grands lecteurs en quête de quelque chose de plus léger !

Même moi, je l’ai lu à mes trois enfants, malgré leurs 9, 12 et 15 ans! Je vous laisse sur cette double page intérieure, magistralement illustrée par Sans cravate, et vous promets de vous en montrer plus d’ici la sortie!

P.S. J’en profite pour mentionner que j’ai un nouveau téléphone qui me permet de prendre de meilleures photos qu’avant… mais que j’ai encore beaucoup de croûtes à manger pour atteindre le niveau des instagrammeuses!!

Coup de blues sur demi-tablette

En montant les bibliothèques dans notre nouvelle maison, j’ai eu envie d’une tablette juste à moi, ou plus précisément, juste pour les livres que j’ai écrits. « La tablette de la vanité » que j’ai annoncé à mon mari qui se demandait ce que je faisais. J’ai récupéré un exemplaire de chacun de mes livres dans mes caisses, je les ai alignés un à côté de l’autre, j’ai contemplé mon œuvre…

… et j’ai déprimé.

15 ans de travail, pour une demi-tablette de livres. Tant d’heures d’écriture, de discipline, d’attente, d’espoirs pour remplir trente centimètres d’une bibliothèque. Un lecteur motivé peut sans doute passer à travers mon œuvre entière en moins d’un mois!

Je sais bien que c’est déjà pas mal, et lorsque je lis la liste sur mon CV, je trouve qu’il y en a beaucoup, je ne suis pas si pessimiste, mais je ne sais pas pourquoi, cette journée-là, dans cette bibliothèque-là, ça m’a semblé peu. On me dit « prolifique », mais il y a des auteurs jeunesse qui sortent 8, 10, 12 livres par année! Dans mon métier, se comparer est une très mauvaise idée en général.

La tablette de la vanité est donc devenue la tablette de l’humilité, celle qui me rappelle que je suis bien peu de choses, mais surtout, que j’ai encore du pain sur la planche.

C’est donc ma nouvelle ambition de carrière : remplir cette foutue tablette jusqu’au bout!

Déjà, j’ai reçu mes exemplaires de Paul Thibaut, ça en fera tout de même bien un de plus (et je vous le montre lundi prochain!).