Dès que Twitter a commencé à gagner en popularité, des auteurs ont eu envie de l’utiliser comme plate-forme de publication. Les « Roman Twitter » y ont pris deux formes : soit des histoires de 140 caractères chacune, ou des fictions plus longues publiées à coup de 140 caractères.
Des exemples du premier, tous les deux publiés par @TwitterFiction
« TIMES UP! » was the last thing I read on the L.E.D screen. Gone were the green, blue and red wires. Gone were my stylish pink wire cutters.
Another jump and she lands in the year 3050, wastelands. Not nuclear, but global warming. Prediction correct. She swallows the cyanide.
Un exemple du deuxième, tiré du « twiller » de Matt Ritchel sous l’alias @mrichtel
Le premier est un divertissement adéquat, possiblement plus proche de la poésie que de la fiction. C’est comme si une nouvelle forme de haïku était née, avec pour seule règle est le nombre de caractères.
La deuxième sorte, soit le roman, me déçoit toujours. Étant moi-même, de par mes deux métiers, assise au point de convergence entre narration et technologie, je ne peux m’empêcher de trouver que de couper un roman normal en tranche de 140 caractères, c’est « manquer le bateau ». Un peu comme si on filmait une pièce de théâtre en continu avec une seule caméra fixe et qu’on appelait ça du cinéma. Déjà, prendre le nombre de caractères en considération améliore un peu l’expérience. À preuve, le roman Twitter small places . Mais là encore, on n’utiliser qu’une partie bien infime de la plate-forme.
L’été dernier, je suivais un archéologue, @amdouat dont les gazouillis ressemblaient, à mon avis, déjà plus à ce qu’une fiction Twitter devrait être :
Était-ce de la fiction? Je n’en ai jamais eu la confirmation officielle! Mais elle s’est espacée sur tout un été, a laissé de grands trous que le lecteur comblait par lui-même, et surtout, ne figurait aucune narration pour faire décrocher le lecteur de son immersion Twitter.
Un autre exemple? Les frasques de Stéphane E. Roy qui a fait semblant, via Twitter, d’être perdu en forêt, étaient, en fait, une très bonne fiction Twitter. Évidemment, un avertissement aux lecteurs du fait qu’il s’agissait d’une fiction aurait été apprécié de tous!
À la lumière de ces exemples existants, à quoi devrait ressembler, selon moi, une fiction Twitter? Voici le fruit de mes réflexions :
Écriture : doit respecter la règle du 140 caractères à tout pris.
Écoulement du temps : la fiction doit être écrite en temps réel. Une minute de temps passé dans la fiction = une minute de temps passé dans la vraie vie. On ne dit pas « une heure plus tard », on attend une heure avant de faire le prochain gazouillis.
Personnages : chaque personnage doit avoir son propre compte twitter La fiction peut ainsi demander à ses lecteurs de suivre plusieurs comptes Twitter différents.
Dialogues : Si les personnages se parlent entre eux, ils doivent le faire en s’interpellent à l’aide du @ et les conversations pouvoir être suivies à rebours par la fonction « in reply to ».
Narrateur : La présence d’un narrateur omniscient est délicate sur Twitter; moins immersive, mais pas impossible. Si l’auteur choisit de mettre un narrateur omniscient, celui-ci doit posséder son propre compte Twitter, différent de ceux des personnages. Personnellement, j’aurai tendance à ne pas en mettre, mais à ajouter de la narration si jamais la fiction Twitter est portée sur format papier par la suite.
Conversation : La possibilité de conversation avec le lecteur est intéressante. C’est la version moderne (et adulte) de guignol demandant aux enfants de l’avertir lorsque le gendarme est dans les parages. Chose certaine, si un lecteur interpelle un personnage par son @, celui-ci devrait répondre, tout en restant fidèle au personnage.
On peut même imaginer une fiction Twitter avec différentes personnes pour interpréter le rôle des personnages, et un auteur qui joue les « maître de jeux ». Twitter théâtre plutôt que Twitter roman? Pourquoi pas!