Archives de catégorie : Réflexions

Couverture du troisième Victor Cordi et retour du premier en librairie

 

Il ne reste que quelques copies du premier Victor Cordi disséminées à travers la province, les 5000 copies au prix de lancement étant partis comme des petits pains chauds! Courte Échelle profite de la sortie du troisième tome pour réimprimer le premier, cette fois-ci au prix régulier. Le tome 3 et les nouveaux tomes 1 seront disponibles à partir du 10 avril, soit juste à temps pour le Salon du livre de Québec!

Pour patienter, voici la page couverture du troisième Tome : Le secret du Machiavélicon.

Illustrations, comme toujours, de Mathieu Benoit!

ScreenHunter_01 Mar. 28 08.04

Les projets qui méritent… ou non… bourses et subventions

Illustration de johnny_automatic sur openclipart.orgÀ la fin mars, pour la première fois de ma carrière, je demanderai une bourse aux conseils des arts du Québec et du Canada. Comme conceptrice interactive, j’en ai demandé des dizaines, toujours pour des entités corporatives, habituellement pour des projets basés sur des univers d’un tiers client. Je les ai souvent obtenus, mais parfois en me disant que je n’aurais pas du…

Je m’explique.

Pour moi, les bourses de création (ou de production) doivent servir à la culture québécoise. J’ai aidé LVLStudio à aller cherche une bourse interactive qui a permis de faire le un jeu web pour la série télé 19-2. Merveilleux! Par contre, j’ai également déjà aidé une autre compagnie à aller chercher des fonds pour faire un jeu basé sur une série de télé-réalité américaine. Hein? Pourquoi? On peut facilement penser que ladite série américaine a assez de sous pour se payer le jeu à même leur poche, ou encore que le nom de la série permettra assez de ventes pour aller chercher les fonds en prêts, ou en « angel », non? Et si les fonds permettent aux compagnies canadiennes de se former une expertise, pourquoi ne pas leur donner l’argent pour créer des propriétés originales à la place?

À cause de ce passé, dans mon esprit, la subvention devrait servir à la culture locale, et j’ose espérer que les Conseils des Arts ne donnent pas de sous pour financer des livres sur les princesses de Disney! Selon moi (et c’est là que je suis peut-être un peu extrême) les subventions de création ne devraient même pas être données à un projet qui à toutes les chances d’être viable commercialement. Donnez-lui plutôt une subvention pour le sortir des frontières du Québec, ça sera plus profitable pour tous!

Bref, je demande cette fois-ci une bourse parce que je suis habitée depuis un an par un projet parfaitement non viable commercialement! Plus littéraire et atmosphérique que tout ce que j’ai écrit jusqu’ici, je ne suis même pas certaine de pouvoir lui attribuer un public cible. J’y troque l’action pour le psychologique; vous n’y trouverez pas l’ombre d’un combat ou d’une poursuite. Il ne fera partie d’aucune collection ou série déjà établie. Le risque est énorme.

Étrangement, j’ai plus peur de ne pas avoir la bourse que lorsque je pouvais apposer à ma demande un magnifique logo américain. Avec un peu de chance, les subventions littéraires ont différents critères que les interactives

Unwritten et le plaisir de la référence obscure

Page de Unwritten trouvé sur le site de  Forbidden PlanetLa semaine dernière, j’ai eu droit à un des grands plaisirs de la lecture. Je suis une lectrice fidèle de la série Unwritten, un comic book dans lequel il est souvent question d’un Harry Potter très légèrement déguisé. Le héros de la série pastiche s’appelle Tommy Taylor, mais porte les lunettes rondes, manie la baguette magique, et a un garçon et une fille de son âge comme compagnons. Bref, il n’y a que le nom de changé… et encore!

Dans le dernier billet de Clémentine Beauvais, mes yeux ont atterri sur une illustration de page couverture d’Harry Potter. En dessous, le nom de l’illustrateur : Thomas Taylor!

Moment de grâce! Tommy Taylor vs Thomas Taylor! Je venais de comprendre l’origine du nom du héros dans Unwritten!!! Rayon de lumière, musique céleste et tout!

Nous plaçons parfois des références obscures dans nos livres en nous disant : « Bah! Il y a un lecteur sur cent qui la comprendra. » Mais ce qu’on oublie, c’est que, pour CE lecteur, l’expérience sera tout simplement extraordinaire! C’est comme déchiffrer son propre Code Da Vinci! L’espace de quelques minutes, on se sent intelligent, privilégié, et surtout, on sent une connexion à l’auteur, comme si on partageait désormais avec lui une « inside joke » tout ce qu’il y a de privé.

Un peu comme les gens de mon quartier qui réalisent que le nom de la directrice d’école dans Victor Cordi est étrangement semblable à celui de la directrice de l’école au coin de la rue…

Bien utiliser la mort

Illustration de Sirrob01 sur openclipart.orgSujet joyeux ce matin, parlons de la mort! Mais non, pas de celle de vraies personnes! De celle des personnages!

Mais juste avant, un message d’intérêt publique:

Je serai au stand de la Courte Échelle (#11) au Salon du livre jeunesse de Longueuil mercredi et samedi de 10h midi. Venez faire un tour!!

La mort, donc. Dans Terrienne, de Jean-Claude Mourlevat, un personnage important meurt de manière complètement gratuite dans la première moitié du livre. « Pourquoi un tel choix de la part de l’auteur? » m’étais-je alors demandée. Ma réponse : « pour monter le niveau de risque ».

Comme de fait, la mort est le plus grand risque que courent nos personnages. Plus elle rôde, et plus le suspense et l’action prennent de l’importance. Si en plus, comme auteur, on prouve qu’on n’hésitera pas à aller jusqu’au bout, le lecteur craindra d’autant plus pour la survie des personnages restés derrière. Le plus bel exemple possible étant possiblement A Game of Throne dans lequel G.R.R. Martin n’a aucun scrupule à tuer des personnages, et pas juste des secondaires!

À l’inverse, si on l’utilise mal, les enjeux disparaissent. J’adorais la série Dragonships Of Vindras de Margaret Weis et Tracy Hickman, jusqu’à ce qu’un des personnages meurt… puis non finalement. Un cœur qui arrête de battre quelques secondes et se ravive sous les coups de poing du docteur (allô Lost!), c’est une chose. Mais les auteurs des Dragonships étaient allés trop loin dans cette supposition de mort. Le corps était bien là, et les rites funèbres avaient commencé. Voler cette mort au lecteur déjà en peine équivalait à dire : « ce personnage ne mourra jamais ». Et si de danger est écarté à jamais, à quoi bon lire le reste?

La Bande dessinée « Seul » a fait bien pire, je ne rentrerai pas dans les détails, mais je leur en veux encore!

Bref, assumez vos morts, ou ne tuez personne, mais de grâce, ne restez pas pris entre les deux!!!

 

Pourquoi les enfants, ados et jeunes adultes sauveraient le monde?

Le Wesley Crusher en questionJ’ai déjà touché au fait que les héros des livres jeunesse modernes sont rarement des adultes. Dans plusieurs livres, cela permet tout simplement de toucher des sujets plus près des lecteurs, comme la vie à l’école, la relation avec les parents et autres. C’est bien beau lorsque l’objet du livre est de gagner la coupe ou de trouver le garçon parfait pour le bal, mais lorsqu’il s’agit de changer le monde, comment justifier que quelqu’un sous la vingtaine réussisse là où ses aînés ont échoué?

Voyons d’abord l’exemple typique d’échec de justification. Tous les geeks connaissent l’irritation que peut causer l’utilisation d’un trop jeune pour sauver les fesses des adultes sous le nom « syndrome Wesley Crusher ». Dans un vaisseau remplis d’adultes entraînés professionnellement à explorer l’espace, l’ado était trop souvent, et sans raison, celui qui trouvait la solution au problème. Leur seule justification : « C’est un génie ». Pour une série qui se voulait sérieuse, c’était insupportable!

Dans les livres que j’ai lu dans la dernière année, j’ai rencontré trois très bonnes manières de justifier la capacité de la jeune génération à dépasser ses ainés. La première est de rendre le jeune protagoniste si connu qu’il devient un symbole derrière lequel les autres peuvent se regrouper. Par exemple, dans Hunger Game, Katniss pose un geste très public de défiance sociétale et gagne ainsi le support de toute une population. Soudainement, il devient possible qu’elle mène une révolution.

La deuxième : par la technologie. En effet, dans Pirate Cinema de Cory Doctorow, et Ready Player One de Ernest Cline, les ado-qui-changent-le-monde le font à partir des outils technologiques qu’ils utilisent bien mieux que les adultes. Les ados sont des natifs des technologies, desquels ils ont une grande compréhension, en plus de n’avoir aucun scrupule à les utiliser à des fins détournées (hacking).

Finalement, un moyen secondaire utilisé par les deux mêmes livres est la capacité de mobilisation de cette tranche de la population. Les ados ont beaucoup de temps libres, officiellement « rien à perdre », et sont constamment reliés les uns aux autres par les réseaux sociaux. S’il doit y avoir une manifestation monstre, le mot se passe rapidement, et les interpelés se libèrent sans problèmes.

Bref, notre meilleure d’une révolution (par exemple contre les armes aux États-Unis, on peut rêver!), ce serait qu’une vedette de type Justin Bieber s’acoquine à une jeune Hacker et organise un Flash Mob via Twitter!

Soit dit en passant, le personnage de Madame PerelPixy dans mes Victor Cordi est présente dans le premier cycle principalement pour justifier ce que réussira Victor dans le deuxième ! Je ne vous en dis pas plus, vous n’aurez qu’à les lire!

 

Hello, y’a quelqu’un?

Illustration de Angelo_gemmi prise sur openclipartLa semaine dernière, j’ai un peu déprimé. Ça m’arrive souvent après la fin d’un manuscrit. Lorsque je suis entre deux livres, mon cerveau trouve le temps de penser, et la première chose sur son agenda est souvent : comment vont mes livres déjà sortis? Il y a bien eu un ou deux palmarès de librairies indépendantes au mois de septembre, puis quelques critiques, mais sinon, c’est le vide complet. Mon imagination s’engouffre alors dans des « à quoi bon tout ce travail? » qui spiralent hors de contrôle.

Puis, pour je ne sais plus trop quelle raison, j’ai cherché Victor dans Nelligan, le catalogue des bibliothèques de la ville de Montréal. Et là, trois petits mots m’ont redonné le sourire.

« De retour le… ».

Non seulement la bibliothèque avait commandé un bon nombre de Victor Cordi, mais certains d’entre eux étaient sortis. J’avais là la preuve ultime que tout allait bien : quelqu’un sur l’île de Montréal était en train de lire mes livres.  Et soudainement, tout en vaut la peine, puisque le livre vit. Dans le fond, le nombre, on s’en fout.

Après m’être questionné des années sur le sens que devaient prendre les Salons du livre pour l’auteur, je venais de trouver la réponse. Comme les livres sortis en bibliothèques, ces événements nous permettent de réaliser que nous ne sommes pas vraiment seuls devant nos ordinateurs à nos tables de cuisine. Il y a en fait des centaines de personnes qui lisent par-dessus notre épaule… en différé.

Vivement le Salon du livre de Longueuil!

 

Post-Scriptum : Et juste comme je désespérais d’avoir des nouvelles de mon livre, il est apparu en dixième position du palmarès des meilleurs vendeurs jeunesse de la librairie Monet pour 2012! Yééééé!!!

 

Bilan de fin d’année et regard sur 2013

J’avais déclaré l’année 2010 celle du développement, et l’année 2011 celle des ententes d’édition. On ne sera donc pas surpris que l’année 2012 ait été… une année d’écriture! Eh oui! Une fois tous les contrats signés, il faut bien les écrire, ces foutus manuscrits!

J’ai donc eu une année productive, durant laquelle j’ai écrit trois romans (Victor Cordi 2, 3, et 4). Et si tout ça ne fait que 60 000 mots, donc moins que bien des romans adultes, le rythme était tout de même intense, considérant que je n’avais que quelques heures par semaines à y consacrer.

Côté publications, c’est enfin la première année où j’atteins l’objectif que j’avais fixé comme condition pour en vivre un jour, soit de publier au moins 3 livres par année. J’ai ainsi publié L’Anomalie maléfique et le Guerrier venu d’ailleurs de la série Victor Cordi ainsi que le Vol des scarpassons de la série Terra Incognita.

Sinon, l’année a été évidemment marquée par la perte de mon père, mais également par un non-événement dont je ne vous avais pas parlé. Mon mari a changé d’emploi, et pour les six premiers mois de l’année, j’ai été dans l’ignorance complète du pays dans lequel on se retrouverait. J’ai donc passé la première moitié de l’année à rêver de/appréhender une nouvelle ville chaque deux semaines, et la deuxième moitié à m’adapter au fait que nous resterions finalement à Montréal.

Ce qu’on me souhaite pour 2013? De manière surprenante, une année tranquille. Il en faut bien une de temps en temps. Ce sera ma première en tant qu’auteur à temps plein et j’ai envie de la savourer tout en douceur.

Les plans pour 2013 :

  • – Publication des 2 prochains Victor Cordi bien sûr, et également de mon album illustré pour les 9-11 ans chez Boomerang.
  • – Rédaction de deux autres Victor Cordi (#5 et #6)
  • – Tentative de placer un (ou deux, ou trois) autre texte et série pour 2014
  • – Possiblement une première demande de bourse

Ce qui me laisse juste assez de place pour les inspirations soudaines et imprévues!

Bonne année 2013 à vous tous!

 

La place de la littérature québécoise : la moitié pleine du verre

L’étagère « albums du Québec et du Canada» de Renaud-Bray est une honte, et le peu de place fait à la littérature jeunesse québécoise dans les médias en est une deuxième. Tout le monde dans l’industrie du livre s’entend sur ces points.

Et pourtant…

Pourtant, des 10 premières positions du palmarès Renaud-Bray, plus de la moitié du top 10 est québécoise. En jeunesse, même constat, et mieux encore, les livres d’ici occupent 4 des 5 premières positions.

Pourtant, Au Salon du livre de Montréal (où 7 invités d’honneur sur 10 sont Québécois), les files d’attente pour Christine Brouillette, Mélanie Watt, Annie Groovie et India Desjardins sont bien aussi longues que celles de leurs équivalents étrangers.

Pourtant, Guy Gavriel Kay, un géant (je ne mâche pas mes mots!) de la littérature fantastique anglophone tweetait la fin de semaine du Salon : «  J’aime comment le Salon du livre de Montréal change ma perspective du monde du livre. Ici, la vedette de A lire, c’est Patrick Sénécal ». G.G. Kay qui attire des foules aux États-Unis, en Angleterre et au Canada anglais, était lui-même seul devant une table vide. (j’en ai profité pour aller me chercher une dédicace, j’étais toute excitée!!!)

Quelque part, il doit bien y avoir quelque chose qu’on fait comme il faut!

Revenons au cas des librairies. Sur les cubes, mes Victor Cordi côtoient les livres de Rick Riordan et de Timothée de Fombelle tout autant que les Corinne de Vailly et Alain M. Bergeron.

J’aime cet état des choses. J’aime que, dans la tête des lecteurs qui passent, il n’y a pas de distinction entre les gros auteurs internationaux et notre production locale. On ne vend pas des carottes : « local » n’équivaut pas nécessairement à « meilleur » dans les yeux des consommateurs. Je préfère côtoyer ce qui se fait de mieux que d’être relayée dans une étagère spécialisé sans certitude que cette dernière serait visitée de mon public à moi.

D’un autre côté, il y a clairement un manque d’éducation, et l’identifiation de produits comme étant « Québécois », est de plus en plus nécessaire.

« Est-ce que c’est vous qui écrivez les Génonimo Stilton? » me demande-t-on régulièrement dans les écoles. « Non, ce sont des Italiens qui les écrivent ». Consternation générale. « Est-ce que Stephanie Meyer signe au Salon? » m’a demandé un duo d’ados au dernier Salon. « Je ne crois pas, elle est américaine »… et la fille si convaincue en ajoute : « mais elle écrit aussi des livres en français, non? ». Une traduction, elle n’avait jamais entendu parler de ça.

Il est donc important de mieux identifier la provenance des livres, mais à la ségrégation par étagère, je préfère personnellement une idée discutée avec Laila Héloua, présidente de l’AEQJ au début de l’automne, soit d’avoir un sceau culturel « produit du Québec » que l’on pourrait apposer aux livres, un peu comme celui de l’industrie alimentaire.

 

À nous ensuite de s’assurer que le seau devienne synonyme de grande qualité.

AJOUT : Hier, après la publication de ce billet, je suis tombée sur une conversation entre auteurs qui parlaient justement du fait que la littérature québécoise n’est pas nécessairement, je cite : « Glamour ». On la défendait par les mêmes files de signature au Salon que moi, et proposait une campagne de publicité pour changer cet état des choses, campagne qui irait très bien avec l’apparition de l’étiquette « fabriqué au Québec » dont je parle ici. Comme quoi l’idée est dans l’air en général.

Salon du Livre de Montréal et retour des animations

Grosse semaine dans le milieu littéraire : c’est le Salon du livre de Montréal! Le plus gros de la province, celui pour lequel tout le monde est là! Je ne fais pas exceptions, voici donc mon horaire, selon les kiosques :

Jeudi 15 novembre : 9h à 12 hres Phoenix (270)
Jeudi 15 novembre : 13h30 à 15 hres Courte Échelle (460)

Vendredi 16 novembre : 9 hres à 12h Phoenix (270)
Vendredi 16 novembre : 14 hres à 15h30 Courte Échelle (460)

Dimanche 18 novembre : 11h30 à 13 hres (460)

À ça s’ajoute une présentation de Victor en salle fermée pour les professeurs, libraires et bibliothécaires vendredi en fin d’après-midi, une promenade au salon en touriste avec ma marmaille dimanche, et une soirée tout ce qu’il y a de plus mondaine entre auteurs; la véritable raison d’être de l’excitation de tous! Les auteurs sont des travailleurs solitaires, et si Facebook est notre « watercooler », le Salon du livre de Montréal est un peu comme notre party de bureau!

Pour ajouter à la frénésie de la semaine, je recommence également les animations scolaires en me rendant dans une école de Longueuil. C’est ma première depuis le mois de juin, j’espère que je ne serai pas trop rouillée! J’en ai profité pour mettre mon document d’animation scolaire à jour, pour ceux qui sont intéressés, il reste de la place dans mon horaire!

Au plaisir de vous voir!

J’aurais aimé aimer « Je lève mon verre »

Dans les derniers trois mois, j’ai fait très peu de création, et beaucoup de révision. Dans ces cas, le cerveau se branche sur la recherche de faiblesse, et tout le quotidien y passe. En chemin vers le Salon du livre de l’Estrie, je suis tombée sur une émission entièrement francophone à CKOI. Comme je n’écoute que de la chanson française, j’ai décidé d’y rester, et mon cerveau en mode « révision littéraire » n’a pas manqué de travail, bien au contraire!

En exemple, j’attire votre attention sur la chanson « Je lève mon verre » de William Deslauriers. Celle-là parce que, contrairement à bien d’autres, elle possède un embryon de grande chanson. Elle aurait pu devenir la nouvelle « gigue à Mitchounano»… avec un peu (beaucoup) de travail!

Notez bien en passant que lorsque je parle de beauté de la langue, je ne parle pas de nécessairement d’utilisation de langage soutenu versus une langue plus populaire. Renaud, Plume Latraverse et Richard Desjardins ont bien prouvé que la poésie pouvait se faire à partir de n’importe quel niveau de langage. Mais même en joual, il y a des formulations plus pauvres (plus laitte!) que d’autre.

Quelques exemples de ce que j’aurais retravaillé :

Je me questionne vraiment à savoir où est-ce qu’on s’en va
Sans être spécialiste je suis capable de dire que j’aime pas ça

La forme « je suis capable de dire que » est lourde est inutile. Si tu n’aimes pas ça, dis-le, c’est tout. Si ça ne rentre plus dans ta rime, dit autre chose de pertinent!

Je lève mon verre
À une terre qui devrait être sans frontière

Pas une fan du « devrait être »! C’est presque didactique. À une terre qui s’rait si belle sans frontière? À une terre que je rêve sans frontière? Autre? Je suis certaine qu’on peut trouver mieux.

Partout sur terre
les hommes font encore plus de misère

Je ne pense pas qu’on puisse « faire » de la misère. Et même si on pouvait, ça reste un verbe faible. Les hommes génèrent de la misère? Bâtissent de la misère? Se vautrent dans la misère? Pleins de choix!

J’admire beaucoup que le jeune Williams écrive ses textes tout seul, mais sa jeunesse et son inexpérience se sentent. Il aurait fallu que quelqu’un le retourne à son ordinateur et lui demande de retravailler le tout. En cette ère d’autopublication, on se demande parfois de quoi aurait l’air le milieu littéraire sans la présence des éditeurs et de leurs directrices littéraires…  et bien il aurait probablement l’air d’une chanson de William Deslauriers!