Dans les dernières semaines, mon amie et collègue Valérie Fontaine a posé une question très intéressante sur un groupe de discussion d’auteurs: le traitement que l’ont doit réserver à la réalité actuelle dans nos écrits? Plus précisément, si on écrit un roman dit « miroir », doit-on faire fi de la crise actuelle et de ses répercussions ou, au contraire, les intégrer au roman?
Voyons chacune des trois options de plus près.
Situer le roman AVANT la crise:
On écrit comme si rien ne s’était passé, comme si tout avait lieu dans l’année qui précède, ou encore dans une réalité alternative où ce satané virus ne s’est jamais pointé le bout du nez. Le problème? C’est que, tout le monde en est conscient, la crise changera des choses au niveau social, et ne pas tenir compte de ces changements risque de dater le roman! Une simple bise de bonjour, une boum entre amis, un concert dans une salle fermée et la temporalité du roman passe de « présent » à « passé »… pour ne pas dire « dépassé! ».
Le situer PENDANT la crise:
Je crois que celui-ci est un piège! Tous les éditeurs craignent d’être inondés de « Journaux de confinement » dans les prochains mois. La vérité est que, juste après la crise, il y a de fortes chances pour que les lecteurs n’aient pas envie d’en entendre parler! Trop tôt! Pas assez de recul! Un peu comme une chanson de Noël au mois de février (ou de la neige au mois de mai, exemple tout à fait hypothétique) !
Le situer APRÈS la crise:
Évidemment, puisqu’il faut en moyenne une année (je dis moyenne, parce que ça peut être plus court comme ça peut être plus long) entre l’écriture d’un roman et sa sortie en librairie, on ose espérer que nous serons rendus à l’après. La meilleure manière de rester « actuel » est donc de tenter de prévoir les changements… mais comment? À moins d’avoir une machine à voyager dans le temps, des dons de voyance, ou un futurologue miraculeusement talentueux à portée de main, les chances de se tromper sont plus grandes que celles d’être justes! Porterons-nous des masques? Toujours? Seulement lorsque nous sommes malades? Juste dans les transports en commun? La forme des files d’attente sera-t-elle changée à jamais? Le télétravail deviendra-t-il la norme, créant ainsi un nouvel exode vers les campagnes? QUI SAIT!!??
Bref, il y a zéro bonne solution!
Je me demande bien si les auteurs se sont posé la question lors de la Révolution française!
J’ai aussi bien hâte de voir, dans un an, les solutions qu’auront choisies mes collègues!