Si j’ai écrit récemment sur les différentes manières de vivre de l’écriture Jeunesse au Québec, une quatrième manière de vivre de l’écriture jeunesse est justement d’en sortir, de ce tout petit marché qu’est le Québec. Évidemment, lorsqu’on écrit en français, la France et ses 64 millions d’habitants est la première sur la liste.
Défaire les mythes :
Lorsqu’un auteur rêve de la France, il se fait souvent rabattre le caquet avec l’argument que « il y a peut-être plus de monde, mais la concurrence est aussi plus forte, tu n’en vendras pas plus ». Une petite recherche m’a tout de même permis de voir que le tirage moyen d’un nouveau livre y est de 8000 exemplaires. Considérant que le tirage moyen québécois tourne plutôt de 2000, l’effet multiplicateur est indéniable.
Il existe plusieurs manières de percer le marché français. La première consiste à publier d’abord au Québec, puis à convaincre un éditeur de là-bas de prendre votre roman pour distribution en France. À ce qu’on m’a dit, il est inutile de s’essayer avant d’en avoir vendu au moins 5000 ici, ce qui constitue déjà un joli petit succès. Il est normal que les éditeurs français soient frileux et ne prennent que les valeurs sûres, après tout, ils devront donner une partie des profits à votre éditeur actuel, ce qui coupe leur part du gâteau un peu. Notez que cette démarche peut autant être faite par vous-même que par votre éditeur.
La deuxième manière dépend entièrement de votre éditeur. Il y a quelques maisons québécoises qui choisissent certaines de leurs œuvres pour les distribuer en France. C’est le cas entre autres des éditions De Mortagne qui, après avoir vu le vaste succès des Chevaliers d’émeraudes qu’ils avaient confié aux éditions Michel Lafon, ont décidé d’éditer eux-mêmes leurs plus grands succès en France. Encore ici, le succès local est un pré-requis. Notez aussi qu’une présence à la librairie du Québec à Paris n’est pas considérée comme une véritable « distribution en France ».
La troisième est toute simple et surprenamment pas beaucoup utilisée. Il s’agit d’envoyer un manuscrit directement en France, sans passer par l’édition d’ici. Les deux désavantages principaux deviennent rapidement apparents et découlent tous deux de la même cause : les maisons françaises sont inondées de manuscrits. Vraiment inondées! Résultat : les chances d’être choisis sont minces, et les délais d’attente de réponse encore plus interminable qu’ici. AJOUT: Dans les commentaires: Elisabeth m’a rappelé que les droits d’auteurs, en France, sont par contre moins élevés. On parle de 8% en publication direct plutôt que 10%. Le pourcentage lorsque le livre est déjà publié au Québec dépend du contrat de l’auteur.
Tout ça pour dire que, en attendant d’avoir un succès de 5000 exemplaires vendus ici ou un éditeur qui distribue en France, j’ai décidé de tenter ma chance avec la méthode numéro trois. En effet, j’avais un petit texte de Noël absolument charmant qui semblait désarçonner les éditeurs d’ici de par son niveau de langage. Comme c’était un texte écrit sur un coup de circonstances et que je n’avais aucune presse de le publier ici, il était un candidat parfait à l’exportation! Histoire de ne pas simplement envoyer le tout de manière aléatoire, je l’ai soumis d’abord à une amie auteure rencontrée via nos blogues respectifs, soit la merveilleuse Maryvonne Rippert, dont le dernier livre, Métal Mélodie, a reçu plusieurs honneurs et fait ravi encore plus de lecteurs. Mme Rippert a eu la gentillesse de me servir de directrice littéraire pour améliorer le rythme du texte ainsi que pour s’assurer de son « Européanité ». Comble de la générosité, elle m’a également fourni l’adresse d’une Éditrice en album jeunesse de sa connaissance. Si le livre parait en France, il lui sera dédicacé!
Le manuscrit en question est parti au mois de février, telle une bouteille à la mer. Je ne m’attends pas à des nouvelles rapides, et, dans le cas d’une réponse négative, j’aurai toujours le loisir de l’essayer ici. Comme on dit : rien à perdre, tout à gagner!