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Objectif raté, encore une fois.

SnarkHunter-Arrow-in-the-grassLorsque j’ai décidé de prendre l’écriture au sérieux, je me suis donné l’objectif de publier trois livres par année. Ça me semblait un minimum. Pour ceux qui trouvent que ce chiffre est énorme, gardez en tête que j’écris pour les 9-11 et qu’aucun de mes romans ne dépasse 20 000 mots (75 pages de manuscrit).

À chaque début d’année, mes trois livres, parfois même quatre, sont inscrits dans les calendriers de production,  et tout est en place pour atteindre ledit objectif. Et chaque année, ou presque, la réalité me rattrape et je n’en publie que deux.

C’est arrivé en 2014 à cause de la faillite de Courte Échelle, c’est presque arrivé en 2013, le retard de l’Encyclopédie ayant été à peine rattrapé par une publication numérique. Eh bien, je viens d’apprendre que ce sera encore le cas pour 2016.

Au printemps, pourtant, tous les espoirs m’étaient permis!  La Courte Échelle reprenait ses activités, et je publiais un sixième Victor Cordi. Les plans étaient alors d’un autre Victor Cordi à l’automne et du Gumzilla pendant l’été, en plus du gardien des soirs de bridge, chez Druide, également à l’automne. Quatre livres en tout.

C’était le plan. La réalité? J’ai eu un meeting avec la nouvelle éditrice jeunesse de la Courte Échelle. Le Gumzilla est à retravailler, et le septième Victor Cordi est tombé dans une craque. Ils s’en remettront tous les deux (j’espère!), mais vraisemblablement pas avant la fin de l’année.

*gros soupir*

Ne reste plus qu’à espérer que 2016 me sera plus clémente.

L’évolution d’un paragraphe!

Tout d’abord, une mini-parenthèse pour inviter tout le monde à participer à l’événement « le 12 août, j’achète un livre québécois »!
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Retour à nos moutons!

Je fais un deux dans un aujourd’hui! Je vous dévoile le premier paragraphe de Sous le divan, premier tome de ma série Le gardien des soirs de bridge, qui paraîtra chez Druide à l’automne, et je vous parle, du même coup, de ré-écriture et de révision!

Commençons par l’extrait de Sous le divan:

Deux enfants dessinaient à la craie sur l’asphalte d’une entrée de garage de banlieue. Ophélie, dix ans, reproduisait un tableau célèbre en suivant les instructions d’un guide trouvé sur Internet. Elle en était à la neuvième étape et le futur chef-d’œuvre ressemblait à un bol de raviolis dans lequel un éléphant se serait assis. Nullement découragée, la fillette se concentrait en replaçant derrière son oreille les longues mèches droites de ses cheveux bruns. Son frère de huit ans, Émile, créait pour sa part des feux d’artifice en écrasant des bouts de craie sous les semelles de ses souliers de course. Comme ces derniers étaient ornés de petites lumières, l’effet artistique était assez réussi.

Ni l’un ni l’autre ne se doutait que, au bout de la rue, le professeur Habbitrøle avait pointé un étrange radar sur leur maison et que les voyants lumineux de l’appareil s’étaient tous allumés.

Et maintenant, ce même paragraphe, tel que je l’ai envoyé dans mon dossier du CALQ, il y a plus d’un an! Notez que ce n’était pas un premier jet, je l’avais déjà retravaillé plus d’une fois! Et pourtant, tout ce qui est en couleur a changé e cours de route!

Légende
Rose :
remplacée
Bleu : déplacée
Rouge : enlevé
Vert : ajouté

Sur l’asphalte chauffé par le soleil d’une entrée de banlieue, deux enfants dessinaient à la craie. Ophélie, 10 ans, reproduisait un tableau célèbre en suivant les étapes d’un guide trouvé sur Internet. Rendu à la dixième étape, le futur chef d’œuvre ressemblait plutôt à un bol de ravioli dans lequel un éléphant se serait assis. La fillette n’en était nullement découragée (ajout de description). Son frère de 8 ans, Émile, créait pour sa part d’artistiques feux d’artifice en écrasant les bouts de craie sous les semelles de ses souliers de course. Comme ces derniers étaient ornés de (ajout d’adjectif) lumières, l’effet (ajout d’adjectif) était assez réussi.

Ni l’un, ni l’autre ne se doutait qu’à l’autre bout de la rue, le professeur Latremouille avait pointé un étrange radar sur leur maison et que les voyants lumineux de l’appareil s’étaient allumés à l’unisson.

Alors, voilà, quand on parle de ré-écriture, de direction littéraire et de révision linguistiques, c’est ce genre de transformation que subit le texte! Et même les textes déjà travaillés y passent!

Rencontre avec les représentants

Comme auteur, on interagit beaucoup avec nos éditeurs/trices, et parfois avec les librairies, sur le terrain. Entre les deux, il y a un maillon important, que nous ne croisons que trop peu : les représentants!

J’ai eu l’immense plaisir de rencontrer ceux qui s’occupent de la distribution des livres chez Druide (qui assume la distribution plutôt que de la confier à un distributeur tier). Tous les auteurs de la maison étaient invités à leur présenter leurs nouveautés de l’automne, pour que les représentants puissent, à leur tour, présenter ces livres aux libraires et acheteurs de grosses chaines pour les convaincre de les prendre en boutique.

N’est-ce pas merveilleux, que de pouvoir expliquer notre livre, et partager son importance à nos yeux en personne plutôt que par la voie d’une simple petite feuille descriptive! Parler à ces cinq personnes, c’est être un degré plus proche des centaines et centaines de libraires qu’ils rencontreront en sillonnant le Québec tout au long de l’année.

Dans une optique similaire, avec les éditions du Phoenix, j’avais eu le plaisir de participer à la « journée Prologue », dans laquelle le distributeur (un des plus gros au Québec) recevait les libraires et bibliothécaires du Québec pour leur présenter les nouveautés.

Je dois avouer avoir trouvé cette rencontre chez Druide rassurante! Le placement en librairie compte pour une partie très importante des ventes, fait sur lequel je panique souvent! En rencontrant les représentants, je suis sortie confiante que mes cette partie de la chaine était entre bonnes mains.

L’heure du conte au Parc Baldwin

Petite activité d’été à faire en famille! Je serai au Parc Baldwin de Montréal trois soirs cet été pour raconter des histoires aux plus jeunes (2 à 6 ans) dans le cadre des animations de parc de l’arrondissement du Plateau Mont-Royal.

Le thème: les trésors de  La Courte Échelle

Pendant une demi-heure/45 minutes, je raconterai donc spécifiquement des livres publiés aux éditions La Courte Échelle durant leur près de 40 ans de règne. J’en ai ramassé une belle pile, grâce à ma bibliothèque personnelle, à la salle de montre de la maison d’édition (que je remercie pour les prêts!) et à la bibliothèque du Plateau Mont-Royal! Je compte d’ailleurs varier les titres d’une rencontre à l’autre!  Ma sélection complète ci-dessous (j’en lirai 4-5 triés sur le volet)!

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30 juin, 28 juillet et 18 août 
À 19h
À l’estrade rouge du Parc Baldwin
(hauteur de Marianne, côté sud)

Notez que, tout au long de l’été, d’autres auteure et animateurs y seront également, avec d’autres thèmes, du mardi au vendredi, même heure, même parc!

Alors, que vous soyez un nostalgique de Jiji et son Tamanoir-mangeur-de-fourmis-pour-vrai,  un fan invétéré d’Élise Gravel,  ou simplement un curieux qui aimerait découvrir ce que La Courte Échelle a fait de mieux, c’est un rendez-vous à ne pas manquer!

La durée de vie d’un livre, prise 2

 

Prise 2, parce que j’en ai déjà parlé ici!

Je dois avouer entretenir une certaine obsession avec la durée de vie des livres sur les tablettes de libraires. Et lorsque je lis des articles comme celui-ci, qui dit que les clients découvrent 71% des livres jeunesses en les voyant au magasin, je me rappelle pourquoi!

J’ai déjà fait l’exercice, lorsque j’avais été nominée au prix des libraires, de vérifier l’inventaire d’une certaine chaine de librairie via leur site internet pour voir de quelle présence bénéficiait tous les nominés. Je dois vous avouer que le résultat n’était pas flamboyant. Plusieurs titres avaient tout simplement disparu de la plupart des succursales, tout nominés qu’ils soient.

Les Naufragés de ChélonMais il y a durée de vie en librairie, et durée de vie tout court! La semaine dernière,  j’ai reçu mon relevé de vente des Éditions du Phoénix pour ma première série, Terra Incognita, publiée entre 2007 et 2012. Je suis toujours agréablement surprise de voir que, malgré qu’elle ne soit généralement plus en librairie depuis belle lurette, elle continue son petit bonhomme de chemin! 200 livres vendus l’année dernière, dont une centaine du premier tome. Tout ça grâce à quelques professeurs qui l’étudient en classe, et à l’éditrice qui continue de le vendre dans les salons du livre.

On s’entend, deux centaines d’exemplaires, ça ne permet pas de payer l’épicerie bien longtemps! Mais à travers des marais de livres pilonnés, je suis heureuse qu’il continue de découvrir de nouveaux lecteurs. Un gros merci à l’éditrice qui continue de croire en ce titre!

L’illustrateur des gardiens des soirs de bridge

Le livre avance! Les textes sont finaux (ou à peu près), le titre est choisi : Sous le divan, et les illustrations vont bon train! Il est trop tôt pour vous les montrer, mais j’avais envie de vous en présenter l’illustrateur : Ghislain Barbe!

Ghislain a commencé sa carrière comme illustrateur pour DreamPod 9, qui éditait des livres de jeux de rôle. Sa série la plus connue est sans doute « Heavy Gear », pour laquelle il a illustré les gros robots!

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Personnellement, je l’ai connu alors qu’il était chez Cinégroupe, à faire les concepts de personnages pour des séries d’animation télévisée. Sa plus connue est Sagwa, ci-dessous, qui a connu un franc succès à l’époque.

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Il travaille maintenant, et depuis plusieurs années, en jeux vidéo, d’abord chez DC Studio (ou j’ai travaillé également, mais pas en même temps!) et chez Behaviour Interactive, anciennement appelé A2M, ou il travaille toujours.

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Comme c’est un ami, je suivais sa page Facebook. Et au moment de choisir un illustrateur pour le Gardien des soirs de bridge, il s’était donné le défi d’effectuer un sketch par jour! Ce sont ces dessins réalisés à la hâte qui ont attiré mon regard et m’ont poussée à proposer son nom à Druide.

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Et voilà! Au cours de l’été, je devrais pouvoir vous montrer la page couverture qu’il est en train de nous cuisiner, ainsi que quelques illustrations intérieures. À date les illustrations qu’il nous a présentées pour Sous le divan se démarquent par leur dynamisme exceptionnel. C’est comme s’il savait où placer sa « caméra » pour nous plonger dans l’action.

Si vous voulez en savoir plus sur lui, vous pouvez visiter son Porte-Folio, ou suivre sa page Tumbler.

Quand l’écriture va, tout va!

illustration de rones prises sur openclipart.orgOn croit souvent que les auteurs ne font qu’écrire, 5 jours semaines, tranquilles à la maison. La réalité, ou du moins, MA réalité, est tout autre! Depuis les mois de février, j’ai fait deux contrats de pige, suis montée à Sherbrooke d’une à deux fois par semaine pour des raisons familiales, en plus des salons du livre et animations scolaires qui ponctuent les semaines tout au long du printemps. Ajoutez à cela trois enfants qui tombent malade/en journée pédagogique, et les semaines complètes d’écriture (voire les journées) se sont font rares.

Mais voilà que je viens d’en avoir une! Une semaine complète avec rien d’autre à l’agenda que d’avancer mes projets! Ça fait un bien fou!

Avec autant de temps à ma disposition, je prends un rythme de croisière rigoureux, mais pépère : écriture le matin, et rattrapage de choses à faire en après-midi, à condition d’être satisfaite de la quantité de travail réalisé en avant-midi. Je réussis ainsi à réduire ma liste de choses à faire, tant au niveau bureaucratique (gestion de facture, envoi de courriels) que domestique (vaisselle, courses, linge d’hiver à ranger depuis deux mois!).

Et le résultat de la semaine? Mon manuscrit des Chroniques Post-Apocalyptiques d’une enfant sage est presque terminé! Si tout va bien, il partira vers mes premiers lecteurs avant la fin de cette semaine!

Et côté moral, il est au plus haut! C’est toujours la même chose : lorsque ça fait longtemps que je n’ai pas écrit, je sombre. Je me mets à douter de tout, j’en viens à avoir l’impression que c’est ma carrière tout entière qui stagne en même temps que mes projets d’écriture. Il suffit d’une petite semaine à écrire pour que tout reparte, y compris mon positivisme.

J’en aurai une deuxième, juste avant que les enfants terminent l’école. Avec un peu de chance, je réussirai même à commencer un nouveau Victor Cordi (cycle 2, livre 3)! J’ai déjà hâte!

 

 

 

 

Trésors d’argot

Je vous ai déjà parlé du langage des Clapontins, que l’on rencontre dans Victor Cordi, Cycle 1, Livre 3: (« Fais-toi un petit trou bien conformiam, mon placo ! Tu en as pour une targe !  » ou encore « on peut dire que tu nous as fait courtailler »)

Je également parlé de mon amour pour les mots inventés. Ces deux choses ont une seule et même origine : ma fascination, depuis l’adolescence, pour l’argot français.

b818acb811e9f3d888c4f4f8daf91749.504x500x1J’ai eu deux maîtres en la matière. Tout d’abord, le chanteur Renaud, découvert à l’adolescence. Si ses œuvres les mieux connues n’ont que quelques perles facilement compréhensibles (« tu sais ma môme, que j’suis morgane de toi »), ses chansons plus vieilles devenaient, pour la Québécoise que je suis, de véritables casse-têtes à déchiffrer (« Quand l’baba cool cradoque est sorti d’son bus volkwagen qu’il avait garé comme une loque devant mon rade»)

Puis, dans la vingtaine, je suis tombée sur Pierre Perret, grâce à une amie. Ce fut le coup de foudre, et il reste, aujourd’hui encore, mon préféré parmi la « vieille garde » de la chanson française. Je suis sa page Facebook juste pour le plaisir de voir des statuts qui commencent par « Salut mes loulous », et où on ne dit pas : « Les enfants étaient super » mais bien, « les lardons étaient aux œufs ».

Vous ne pouvez imaginer mon bonheur lorsque, il y a une semaine ou deux, je suis tombée sur ces deux petites merveilles :

Pierre Perret Le renard et la cigogne          Pierre Perret Le loup et l'agneau
 

Des fables de Lafontaine, racontées par Pierre Perret! Je ne savais même pas que ça existait!

On y trouve des rimes sublimes :
«  Honteux comme un taureau, qui aurait paumé ses cornes,
Le renard s’était fait roulé dans le pop corn »

Des phrases quasi incompréhensibles pour le néophyte :
« Le loup à toute burbure, enjambe le cresson »

Et des morales discutables :
« Tuer un p’ptit agneau sans défense?…  c’est bien laid…
Mais c’est pas dégueulasse avec des flageolets !»

Bref, un trésor pour moi, de ce type de trésor qu’on ne trouve que dans les librairies de livres usagés. Le dos de la couverture en annonce deux autres titres, je mettrai la main dessus, je le jure!

 

Le mot juste

ScreenHunter_01 May. 24 07.54Cette semaine, j’ai reçu le texte révisé du premier tome de la série « le Gardien des soirs de bridge » qui sera publié aux éditions Druide en septembre. Pour mon plus grand plaisir, c’est Lise Duquette, qui avait également révisé tous mes Victor Cordi chez Courte Échelle, qui a été chargée du mandat.

Ce n’est pas toujours facile de trouver une bonne réviseure. Il faut, évidemment, qu’elle soit rigoureuse, mais également qu’elle comprenne le style de l’auteur, et qu’elle soit suffisamment souple pour, parfois, laisser passer des impropriétés. Pourquoi? Parce qu’il arrive que le bon usage de la langue française et la bonne compréhension du lecteur sont en conflits! Un classique? Les « mitaines » québécoises. Elles ne sont pas acceptées par les dictionnaires. Vous imaginez un jeune lecteur d’ici tomber sur le mot « moufles »? Je dois avouer avoir déjà mis des gants à la place à un personnage juste pour m’éviter le problème!

Dans mon dernier manuscrit, j’ai eu droit à trois autres instances de problème similaires.

Un trampoline, vs une trampoline
Le premier est le genre du mot « trampoline ». Tous les dictionnaires demandent le masculin, alors que la langue courante demande plutôt le masculin. Grâce à Antidote, qui indique que le masculin est utilisé au Québec, j’ai pu garder mon « un trampoline »! Yé!

Porte-fenêtre ou porte-patio
Tout le monde sait ce qu’est une porte-patio. Pourtant, ce n’est pas une véritable expression. Il faut plutôt dire une porte-fenêtre. Mais si je mets ce mot dans mon roman, personne ne va comprendre la description. Ils imagineront plutôt une porte pivotante normale avec une grande fenêtre au milieu, et non cette vitre énorme qui se pousse sur le côté. Parce que Lise est rigoureuse, elle a suggéré la modification. Parce qu’elle est souple, elle m’a permis de la refuser.

Divan vs Canapé
Le dernier cas nous a posé plus de problèmes! Dans un chapitre, toute l’action se concentre autour du divan du salon. Selon tous les dictionnaires, y compris Antidote, un divan n’a ni accoudoirs, ni dossiers. Ce que nous avons, pour la plupart, dans nos salons, ce sont des canapés. En temps normal, ce changement ne m’aurait pas dérangée… mais il s’adonne que le titre prévu pour ce premier tome était : « Sous le divan ».

Il faut l’avouer, « Sous le canapé », ça n’a pas la même connotation. Ça sent l’importation française à plein nez! Le problème a dû être monté jusqu’aux « grands druides » tout en haut de la hiérarchie. Ils ont trouvé plusieurs instances du mot « divan » utilisé dans le même sens que moi dans des articles journalistiques crédibles. C’est finalement le précédent créé par Nadine Descheneaux par sa série « les secrets du divan rose », qui a rendu la chose acceptable. Au prochain Salon du livre, faites-moi penser que je dois une bière à Nadine!

Je peux donc annoncer officiellement que le premier tome du Gardien des soirs de bridge s’intitulera « Sous le divan »!

Auteurs jeunesse et vedettariat

illustration de PianoBrad sur openclipart.orgDans le dernier mois, j’ai reçu la même question surprenante de deux enfants différents. Si je ne me souviens plus très bien des mots utilisés par la deuxième, la première question m’avait frappée, et la voici dans toute son exactitude :

« Est-ce que tu es capable de faire ton épicerie? »

J’ai d’abord cru que c’était une question monétaire, mais non, elle me demandait si je pouvais vaquer à mes occupations incognito, ou si j’étais, partout, assaillie de demandes d’autographes et de selfies, comme une star d’Hollywood!

Pour toute réponse, je lui ai demandé quel était son auteur préféré (c’était Catherine Girard Audet), puis lui ai demandé si elle la reconnaîtrait dans la rue. Elle a dû avouer que non. À part India Desjardins, Brian Perro, et peut-être Annie Groovie, je ne pense pas qu’aucun auteur jeunesse québécois se fasse reconnaître en pleine rue. Nos livres sont connus, mais pas nos visages. Pour une telle reconnaissance, il faut passer à la télé en heure de grande écoute. Tout le monde en parle est possiblement le plus grand créateur de vedettes au Québec, et on ne peut pas dire qu’ils invitent souvent des auteurs jeunesse sur leur plateau.

Puis, je suis allée à Toronto, pour les prix de la forêt de la lecture. Et soudainement, tous les auteurs jeunesse étaient des vedettes! Nous devions être environ une 15aine d’auteurs Québécois et tout était en place pour que nous nous sentions spéciaux! Tout d’abord par le traitement que nous réservaient les organisateurs : transport en avion et hôtel 4 étoiles payés, cocardes spéciales pour nous identifier comme nominés, et accueil chaleureux. Une des volontaires avait même amené une valise complète de livres à nous faire signer.

Mais encore plus le traitement que nous réservaient les jeunes! Lors de la cérémonie de prix, une foule complète acclamait la présence de chaque auteur sur scène à grands cris. Dans les corridors, les têtes se tournaient, et nos noms étaient chuchotés derrière nos dos. Lors de la séance de signature, nous avons tous eut droit à des files d’attente interminables de jeunes excités d’avoir nos autographes. Il aura suffi de quelques passeurs extraordinaires pour allumer des milliers de jeunes à la lecture, et faire de nous quinze des vedettes instantanées.

On rit toujours un peu, entre auteurs, du cirque médiatique lorsqu’une vedette écrit un livre jeunesse. En revenant de Toronto, je me demande soudain si les médias ne prennent pas le phénomène à l’envers : ils pourraient eux-même transformer les auteurs jeunesse en vedettes à la place! Ça leur en ferait plus! C’est possible, je l’ai vu à Toronto.