Tous les articles par Annie Bacon

La vie d’un livre

Il y a peu, Sophielit a eu la gentillesse de m’identifier sous une publication Instagram qui parlait de mon roman La Promesse du fleuve. Je suis très peu active sur cette plateforme, mais j’y suis inscrite, ne serait-ce que pour voir les magnifiques montages photos dans lesquels mes livres se retrouvent parfois!

Voici la publication en question, de car.ni.or :

Le texte continue en disant : « Merci à @passion_et_crayon qui m’a convaincue de me procurer ce magnifique roman… ». J’ai décidé de jouer les détectives et de voir ce qu’en avait justement dit cet usager!

Je trouve sa page et descends assez loin pour trouver ceci :

Un peu plus bas, une seconde publication du même compte montre le livre à travers une énorme pile de ses trouvailles littéraires. Dans le texte qui accompagne la photo, je lis que La promesse du fleuve lui a été suggéré par @madame.gabrielle.

Le jeu de piste continue!

Je descends très (très!) loin dans les publications de @madame.gabrielle pour finalement trouver ceci :

Le fameux bouche-à-oreille à l’œuvre, de manière on ne peut plus concrète.

Les publications ci-haut s’étalent de décembre 2020 à mars 2022. Le livre, pour sa part, est sorti en septembre 2019. Vous vous en doutez bien, il n’est plus en vedette dans les librairies (et même bien souvent disparu des tablettes, selon la librairie), ce qui ne veut pas dire que sa vie est terminée!

C’est dans ce genre de moment que je réalise tout ce que je dois aux passeurs : les personnes qui lisent mes livres, en parlent et, de par leur enthousiasme, convainquent d’autres lecteurs.rices de les lire à leur tour.

À tous ces passionnés, je veux dire un gros « merci », et à tous les autres, je vous encourage à parler de vos coups de cœur. C’est par vous que nos livres continuent de vivre bien après leur publication.

Thème narratif : les âmes des morts!

C’est un thème que j’ai beaucoup rencontré dans les dernières années : celui d’aider ou de récolter les âmes des défunts. Pourtant, il est très peu présent en littérature jeunesse, du moins dans les livres que j’ai lus. Le seul auquel j’ai pu penser est Zoélie L’allumette de Marie Potvin, dans lequel l’héroïne tente d’aider son ami fantôme. Pourtant, c’est un thème riche qui peut facilement être adapté pour les enfants. Tour d’horizon des possibilités.

Aider les morts à trouver le repos
Une manière toute gentille d’aborder le thème est de confier au personnage principal la tâche d’apporter le repos aux fantômes. Le jeu Montréalais Spirit Farer, par exemple, présente une jeune fille responsable d’un bateau qui accueille les esprits des morts en attendant qu’elles soient prêtes à passer sous le pont des âmes. Elle leur parle, les nourrit, écoute leurs souvenirs et remplit leurs dernières volontés.

Dans le roman pour Under the Whispering Door, c’est dans un café que les âmes se préparent à passer au repos éternel. Deux personnes s’y partagent le travail : l’un d’eux va chercher les âmes à leur lieu de mort, et le second sert d’oreille attentive et bienveillante pour la préparation psychologique.

Pour Cozy Grove, un second jeu vidéo dit « gentil » (wholesome game en anglais), ou gentil, c’est sur une île que les âmes se retrouvent, sous la forme d’ours fantômes. Au choix du joueur, un louveteau ou une jeannette doit aider les fantômes à faire la paix avec leurs erreurs passées pour obtenir ses badges de « scout à l’écoute ».

Dans tous les cas, on passe peu de temps sur la mort elle-même, puisqu’elle est souvent déjà un fait accompli lors de la rencontre. Les nombreux fantômes permettent de plonger dans les souvenirs avec un certain recul, et d’y trouver rédemption. Le personnage du passeur sert de fil conducteur entre les différentes histoires.

Récolter les âmes
La seconde manière de traiter le thème est probablement plus appropriée pour les enfants d’au moins 10 ans et les adolescents. L’idée est que la tâche du personnage principal soit de ramasser les âmes, et non de leur apporter le repos. Cette fois-ci, l’accent n’est plus sur les souvenirs émouvants, mais bien sur le récolteur lui-même, souvent identifié comme un « faucheur » avec ce que ça implique d’attributs (capuchon noir, faux, parfois même visage de squelette). Ce thème permet une ambiance gothique sans nécessairement tomber dans l’horreur.

Cette fois encore, c’est dans les jeux vidéo qu’on rencontre ce genre d’univers. Par exemple, dans Death’s Door, le personnage principal est un corbeau qui travaille pour le bureau de récolte des âmes. Ses confrères et lui se sont fait offrir l’immortalité en échange de leurs services. Un second jeu vidéo présentant la récolte des morts comme une bureaucratie vient également de sortir, sous le nom « Have a nice Death ». La bande-annonce est magnifique!
Du côté des animés vient Soul Eater, sorte de Harry Potter de la mort qui suit plusieurs élèves dans une école pour apprendre à collecter les âmes. Avouez que c’est peu banal! En prime, les armes des apprentis sont elles-mêmes des élèves qui se transforment sur demande en faux, en fusil ou en autres armes. Chaque élève doit récolter 99 âmes normales et une âme de sorcière pour graduer.

Côté manga, Alpi, the soul sender est une petite fille qui a hérité d’un don particulier : la capacité de purifier l’âme de créatures magiques qui autrefois aidaient les habitants, mais qui avec le temps sont devenus néfastes et dangereuses. Les créatures meurent lors du rituel, mais le sujet est traité avec délicatesse et le manga peut être lu sans problème par des enfants de 10 ans et plus.
J’aurais aussi pu mentionner Flipping Death (jeu vidéo) ou Zorn et Dirna (bande dessinée européenne), et sans doute plusieurs autres auxquels je ne pense pas, ou que je n’ai pas rencontrés.

Mon point est que le thème de la mort peut être adapté à tous les publics et tous les médiums, et que la littérature jeunesse semble hésiter à s’en emparer! Les auteurs seraient-ils frileux, ou manqueraient-ils d’imagination? Chose certaine, j’y vois beaucoup d’opportunités!

Extrait des Chroniques post-apocalyptiques d’un garçon perdu

Moins de trois semaines avant la sortie du troisième tome des Chroniques post-apocalyptiques, prévu en librairie le 23 mars. Je vous avais dévoilé la couverture il y a quelques semaines, j’ai pensé qu’il serait temps de vous permettre de rencontrer le nouveau personnage principal : Hatim.

Voici les deux premières pages de son récit :

 

Dix septembre
Montréal, Parc-Extension 

Le soir est tombé, et, avec lui,
toute la fraîcheur dont septembre est capable.
Recroquevillé sur le plancher d’un dépanneur
de la rue Jean-Talon, Hatim a froid.
Il rentre ses bras à l’intérieur de son hoodie
et cache ses mains sous ses aisselles pour les
réchauffer, pour ne plus voir leur tremblement.
Il y a deux jours qu’il n’a rien consommé d’enivrant.
Que de la nourriture et de l’eau.
Son corps est en manque, son esprit aussi.

Affronter Montréal en ruine
est plus difficile seul qu’à plusieurs.
Il a laissé une gang derrière lui. Un chef, des amis.
Des gens avec qui il était facile
d’oublier les tracas, les remords, les regrets.
Il est tenté de retourner auprès d’eux.
De s’engourdir les sens à nouveau.

À côté de l’étalage des bonbons,
la silhouette de son frère apparaît.
Yosrie, avec les mêmes cheveux noirs bouclés que lui,
la même fossette dans la joue droite lorsqu’il sourit.
Le garçon est en pyjama et demande :

« Lis-moi une histoire ! »

Comme il le faisait tous les soirs, dans leur vie d’avant.
Les deux garçons se collaient alors l’un contre l’autre
pour partager une aventure, une leçon, une rigolade.
Petit havre de douceur dans la vie de l’adolescent.

Les mains toujours tremblantes,
Hatim s’enfouit le visage dans le capuchon de son hoodie
et se raccroche à ce souvenir pour ne pas sombrer,
pour ne plus avoir froid.

Et, surtout, pour ne pas penser
au fait qu’il est seul dans le dépanneur.

Découvrez un extrait plus long par ici! 

Les trous noirs à temps

Je le dis souvent : le plus difficile, dans le métier d’auteur, c’est la discipline! Des délais à très longs termes, parfois même aucune date de tombée officielle, et personne pour regarder par-dessus notre épaule.

Nous sommes les seuls maîtres de notre productivité… et l’internet n’est pas notre allié!

Depuis le début de l’année, sorte de résolution de Nouvel An, je tente de faire la guerre aux liens chronophages, appelés des « time wasters » en anglais. Vous les connaissez : ces pages qui listent des choses pas tout à fait dignes d’intérêt, mais pas assez ennuyeuses pour regarder ailleurs non plus. Les tweets les plus drôles de la semaine, les photos prises juste au bon moment, les histoires de revanche entre voisins, les astuces ménagères qui changeront votre vie, les réponses les plus audacieuses rencontrées par des professeurs, les secrets cachés dans tel film, etc.!

On clique, dans un moment de faiblesse, en se disant que ça ne prendra qu’une trentaine de secondes et que, de toute manière, on est bloqué sur notre chapitre. On y perd finalement d’interminables minutes sans pour autant régler notre problème de manque d’inspiration. Le pire, c’est qu’il suffit de cliquer sur un seul de ces liens pour que notre fil d’actualité se retrouve inondé de publications semblables.

Il fut un temps où, si mon écriture n’avançait pas à mon goût, je fermais le Wifi pour mettre fin à cette tentation. Avec mon mari qui télétravaille, ce n’est plus une option. Je tente donc simplement de résister au meilleur de mes capacités et de bloquer les liens suggérés pour nettoyer mon fil d’actualité Facebook.

Il y a des jours où ça va…  mais quand la fatigue ou le manque d’inspiration embarque, la discipline vacille.

Je suis mon pire ennemi.

Pétronille s’envole pour l’Europe!

Ma série Pétronille Inc. a des ailes! Alors que le tome 5 a été envoyé à Boum pour les illustrations, voilà que le tome 1 a été sélectionné par les Éditions Kennes pour une publication en Europe!

Illustration de Boum pour le tome 2 de Pétronille inc.

Le premier Tome sera publié au mois d’août, avec la couverture et les illustrations originales de Boum!

Entre La promesse du fleuve publié directement en France chez Castlemore et mes deux albums aux 400 coups*, qui se distribuent eux-mêmes outremer, ce sera mon 4e livre à traverser l’Atlantique… mais le premier à le faire de la manière la plus traditionnelle.

On croise les doigts pour que l’engouement soit suffisant pour que tous les tomes de la série s’y retrouvent!

*: soit La légende de Paul Thibault, et De la beauté.

Petits bonheurs de l’auteur jeunesse

C’est l’hiver, il fait gris, les journées sont courtes, il faut trouver le positif là où on peut! Voici donc, dans le désordre, une liste des petits bonheurs de l’écrivain jeunesse! Je pensais en écrire dix, mais je me suis laissée emporter. Il faut croire que j’aime mon métier!

  • Recevoir sa boîte de livres!
  • Tomber dans cet état de concentration par lequel plus rien d’autre que l’écriture n’existe.
  • Voir les premières esquisses des dessins (intérieurs ou couverture).
  • Se faire dire que notre livre est le premier qu’a dévoré un lecteur réticent.
  • Recevoir un petit commentaire positif de son éditeur, à travers la longue liste des suggestions d’améliorations en direction littéraire.
  • Ajouter un détail pour mener les lecteurs sur une fausse piste (plaisir sadique!)
  • Voir notre livre en librairie. Mieux encore, dans les mains d’un lecteur.
  • Transformer la version 0 en version 1 parce qu’elle est prête à être envoyée à l’éditeur
  • Apprendre qu’un de nos ami/complice/collègue préféré fait partie de la même tournée scolaire que nous!
  • Se relire et trouver une phrase qui nous plait particulièrement.
  • Ne pas avoir le temps de s’ennuyer durant un Salon du livre.
  • Lire mention de notre nom sur un média social… par quelqu’un qu’on ne connait pas du tout.
  • Trouver le dernier morceau du puzzle de son histoire, celui qui relie toutes les idées ensemble de manière cohérente.
  • Vivre un contact particulièrement fort avec une classe en animation.
  • Écrire une scène qui nous touche nous-mêmes, nous fait pleurer, nous fait rire.
  • Signer un exemplaire très usé, amené spécialement de la maison par un lecteur

Atteindre mon salaire d’employée

C’est une publication Facebook que je me souviens avoir vu passer, écrite par Alain M. Bergeron. Il disait avoir atteint, après des années comme auteur jeunesse, le même salaire qu’il faisait comme journaliste avant de changer de carrière.

C’est mon tour!

J’ai compilé mes revenus de l’année dernière pour préparer ma paperasse de TPS/TVQ, et j’ai finalement atteint le salaire que je faisais lorsque je travaillais à temps plein dans un studio de jeux vidéo.

Droits d’auteurs + animations scolaires + contrats très occasionnels.

Ça m’aura pris 15 ans!

15 années de travail autonome à vivre de ma passion, à un rythme qui m’a permis de conjuguer travail et famille selon mes désirs.

Très fière de moi, zéro regret, aucun plan autre que de continuer.

Les petits mystères à l’école:  trois envies d’un coup! 

La semaine dernière, j’ai remis une nouvelle littéraire à Richard Migneault, qui dirige les recueils Les mystères à l’école, et Les petits mystères à l’école chez Druide. Ce petit texte de 2000 mots m’a permis de remplir trois désirs de longue date!

Désir #1: Le narrateur témoin
Depuis que j’ai lu Le joueur d’échecs (Stefan Zweig), j’ai cette envie d’un narrateur qui serait participant… mais non le protagoniste. À la manière du Watson de Sherlock Holmes, ou du Sancho Pança de Don Quichotte. J’en avait d’ailleur parlé dans un billet il y a quelques mois.

Désir #2: Revisiter l’univers du Gardien des soirs de bridge
Puisque la série est chez Druide, qui publie également le recueil de nouvelles, j’ai facilement eu le feu vert pour situer la nouvelle dans l’univers de cette série! Quel plaisir qu’avoir à nouveau le professeur Habbitrøle à l’esprit, même si ce n’est que pour une courte aventure.

Désir #3: Faire plaisir aux élèves d’une classe! 
Et finalement, j’ai pu utiliser des noms que des élèves m’avaient confiés! C’était à la fin d’une animation scolaire. Un élève m’a demandé d’utiliser son nom dans un roman. Je lui ai dit de l’écrire sur un bout de papier, et de le mettre dans mon sac. Vous vous en doutez, c’est bientôt 20 noms qui s’y sont accumulés! Et si je n’en ait utilisé qu’une petite partie, tirée au hasard, j’ai un peu l’impression d’avoir tenu une promesse non dite.

Il me reste à voir ce que Richard Migneault en pense! Surtout, j’ai hâte de lire les autres nouvelles, écrites par mes collègues, qui se retrouveront dans le même livre!