Cette semaine, j’ai reçu le texte révisé du premier tome de la série « le Gardien des soirs de bridge » qui sera publié aux éditions Druide en septembre. Pour mon plus grand plaisir, c’est Lise Duquette, qui avait également révisé tous mes Victor Cordi chez Courte Échelle, qui a été chargée du mandat.
Ce n’est pas toujours facile de trouver une bonne réviseure. Il faut, évidemment, qu’elle soit rigoureuse, mais également qu’elle comprenne le style de l’auteur, et qu’elle soit suffisamment souple pour, parfois, laisser passer des impropriétés. Pourquoi? Parce qu’il arrive que le bon usage de la langue française et la bonne compréhension du lecteur sont en conflits! Un classique? Les « mitaines » québécoises. Elles ne sont pas acceptées par les dictionnaires. Vous imaginez un jeune lecteur d’ici tomber sur le mot « moufles »? Je dois avouer avoir déjà mis des gants à la place à un personnage juste pour m’éviter le problème!
Dans mon dernier manuscrit, j’ai eu droit à trois autres instances de problème similaires.
Un trampoline, vs une trampoline
Le premier est le genre du mot « trampoline ». Tous les dictionnaires demandent le masculin, alors que la langue courante demande plutôt le masculin. Grâce à Antidote, qui indique que le masculin est utilisé au Québec, j’ai pu garder mon « un trampoline »! Yé!
Porte-fenêtre ou porte-patio
Tout le monde sait ce qu’est une porte-patio. Pourtant, ce n’est pas une véritable expression. Il faut plutôt dire une porte-fenêtre. Mais si je mets ce mot dans mon roman, personne ne va comprendre la description. Ils imagineront plutôt une porte pivotante normale avec une grande fenêtre au milieu, et non cette vitre énorme qui se pousse sur le côté. Parce que Lise est rigoureuse, elle a suggéré la modification. Parce qu’elle est souple, elle m’a permis de la refuser.
Divan vs Canapé
Le dernier cas nous a posé plus de problèmes! Dans un chapitre, toute l’action se concentre autour du divan du salon. Selon tous les dictionnaires, y compris Antidote, un divan n’a ni accoudoirs, ni dossiers. Ce que nous avons, pour la plupart, dans nos salons, ce sont des canapés. En temps normal, ce changement ne m’aurait pas dérangée… mais il s’adonne que le titre prévu pour ce premier tome était : « Sous le divan ».
Il faut l’avouer, « Sous le canapé », ça n’a pas la même connotation. Ça sent l’importation française à plein nez! Le problème a dû être monté jusqu’aux « grands druides » tout en haut de la hiérarchie. Ils ont trouvé plusieurs instances du mot « divan » utilisé dans le même sens que moi dans des articles journalistiques crédibles. C’est finalement le précédent créé par Nadine Descheneaux par sa série « les secrets du divan rose », qui a rendu la chose acceptable. Au prochain Salon du livre, faites-moi penser que je dois une bière à Nadine!
Je peux donc annoncer officiellement que le premier tome du Gardien des soirs de bridge s’intitulera « Sous le divan »!
Je comprends que, surtout aux éditions Druide, on veut une langue irréprochable (ou presque) dans les romans publiés.
Mais des fois ce coupage de cheveux en quatre me rend folle. Il faut admettre un moment donné que le français est une langue vivante et l’usage doit l’emporter sur la tradition.
Sinon, ben autant tout publier en latin ou en français du 14e siècle!
@gen: C’est pour ça que j’aime travailler avec Lise, elle n’est pas « ayatollah », elle laisse passer ceux qui font du sens.
Je comprends pour les deux autres exemples, mais je ne suis pas certaine pour trampoline. Le féminin ne change rien au sens du mot et ne change pas l’image mentale du jeune qui lit le roman. En le voyant employé avec le masculin, au pire, il se dit que l’auteure a fait une faute, et au mieux, il apprend ainsi le bon usage. À l’école on lui a déjà mentionné le genre de ce mot, car ils apprennent le bon usage et non la langue parlée. Je ne suis pas ayatollah, loin de là, mais j’aurais tenu mon bout pour celui-là! D’après moi, lire c’est aussi s’instruire!