Garder le contrôle sur son texte… sans être borné!  

Un des segments de mes animations scolaires sert à expliquer aux jeunes qu’il y a toujours des dizaines et des dizaines de manières différentes de dire la même chose. Pour l’auteur, c’est à la fois une bénédiction et une malédiction.

Une malédiction parce que ça veut dire qu’il n’y a pas UNE bonne réponse à laquelle on pourrait se fier, ce qui nous maintient dans le doute constant.

Une bénédiction, parce que si le réviseur n’aime pas notre phrase et qu’on n’aime pas la phrase qu’il propose en échange… et bien il y a toujours moyen de trouver une troisième option!

J’ai remarqué dans la dernière année que je le fais de plus en plus souvent.

Un exemple concret :

Phrase originale :
Ses traits sont ingrats : sur une peau un peu craquelée, son nez démesuré pendouille au-dessus d’un menton en galoche.

Proposition du réviseur :
Ses traits sont ingrats : il a la peau du visage un peu craquelée et un nez démesuré qui pendouille au-dessus d’un menton en galoche

Ma contre-proposition :
Ses traits sont ingrats : la peau de son visage se craquelle lorsqu’il parle, et son nez démesuré pendouille au-dessus d’un menton en galoche.

Avec l’expérience, j’ai une vision de plus en plus claire du style que je désire pour mon texte. Lorsque je parle de cette étape, les élèves me demandent parfois : « est-ce que tu as le droit de tout refuser ? ». Auquel je réponds : « oui, mais l’éditeur a le droit de refuser de me publier! ». Il faut dose, et se faire confiance mutuellement.

Mon conseil :

  • Lorsque la phrase du réviseur est meilleure (habituellement la majorité des cas), tu acceptes les modifications avec gratitude.
  • Si tu apprécies les deux versions de manière égale, tu fais confiance au réviseur, il devait avoir une bonne raison de ne pas aimer ta phrase.
  • Si tu n’aimes pas la version proposée, plutôt que de refuser en bloc, améliore tout de même ta phrase en suggérant une troisième version qui ressemble plus à ton style.

On a tous nos préférences et on a tous nos aversions. Par exemple, je déteste les phases qui commencent par « mais », et encore plus les euphonies du type « expliqué-je ». C’est une sensibilité toute personnelle et je refuse systématiquement ces propositions. Ça ne veut pas dire que le réviseur n’a pas eu raison de me les suggérer.

Le travail éditorial n’est pas une dictature ni d’un côté ni de l’autre. C’est un travail d’équipe entre deux professionnels dont l’objectif est le même : produire le meilleur texte possible.

Confirmé : un 7e tome de Pétronille inc.

Illustration : Boum

Bien agréable appel de la part de mon éditeur la semaine dernière : après discussion avec l’équipe commerciale de chez Druide, elle me donnait le feu vers pour écrire un nouveau tome de Pétronille inc.!

Youppi!!

Boum aussi a confirmé qu’elle embarquait dans l’aventure. Heureusement! La série ne serait pas la même sans ses magnifiques illustrations!

Il faudra cependant être patient, puisque la littérature n’est pas une industrie rapide!

Voici donc ce qui nous attends :

Septembre 2025 : Je commence à écrire le roman

Octobre 2025 : l’album de Pétronille, déjà terminé, arrivera en librairie

Octobre 2026 : Le tome 7 de la série arrivera dans vos mains!

J’ai déjà son titre en tête depuis belle lurette! Demandez-le moi si jamais on se croise! Vous aurez une exclusivité!

Au moins une chose qui va bien en culture…

Lorsque l’on entend parler de culture ces temps-ci, c’est beaucoup pour se faire dire que tout va mal : les revenus des artistes fondent comme neige au printemps, les jeunes ne connaissent que les réseaux sociaux, les gens consomment principalement de la culture étrangère, etc.

J’ai donc eu envie de mettre en lumière un aspect culturel qui va bien : en littérature (tant jeunesse qu’adulte) les livres québécois se vendent mieux que les autres.

Il y a longtemps que je le constate et je pourrais vous demander de me croire sur parole,  mais en voici tout de même une preuve à l’appui, soit le palmarès Gaspard de la semaine dernière :

On compte 8 livres québécois dans le top 10 ci-dessus, et environ les deux tiers du top 50 sont occupés par des titres québécois!

C’est ainsi chaque semaine!

Ça ne dit rien évidemment sur les ventes totales ni sur tout ce qui peut se vendre sur d’autres plates-formes, mais j’y vois tout de même une tendance réjouissante.

J’y vois la preuve que les lecteurs sont intéressés par ce que les auteurs d’ici ont à dire, et que libraires font un travail exceptionnel pour mettre des titres québécois dans leurs mains. Si seulement les algorithmes de suggestions de musique, de films et de séries télévisées pouvaient en faire autant!

Mon nouvel accessoire d’écriture…

Non, il ne s’agit pas d’une nouvelle souris d’ordinateur ou d’un clavier personnalisé! Depuis trois semaines, je dois porter cette attelle chaque fois que j’écris :

Eh oui, je souffre d’une épicondylite latérale, mieux connue sous le nom de « tennis Elbow ». La bonne nouvelle, c’est que mon physio ne m’a pas demandé d’arrêter d’écrire, ce que je craignais. Je ne m’imagine pas dicter dans un micro, et ne pas écrire n’est pas vraiment une option. J’ai par contre beaucoup diminué les jeux vidéo.

En plus de l’attelle, j’ai des exercices (étirements et poids) à faire tous les jours. Le physio m’a surtout dit que ça prendrait six mois à guérir, puisque ce sont des microlésions des tendons, et que les tendons ne se régénèrent que lentement.

Je dois le porter pour écrire à la main, alors ne vous étonnez pas de le voir à mon bras lors de mes animations scolaires ou du Salon du livre de Québec!

Tout ça ne m’a pas empêché de commencer le deuxième tome de Camp de jour, pour lequel j’en suis à 4000 mots environ.

Dévoilement : couverture de Camp de jour

C’est important, la couverture d’un premier tome de série, puisqu’il donnera le ton à tous les suivants! Il faut l’avouer, pour celle de Camp de jour, l’équipe de La Bagnole s’est surpassée! La typo du titre annonce bien l’aspect « fantasy », la lumière et l’ambiance sont particulièrement intrigantes, et que dire du cadre de tentacules avec ses couleurs néons!!!

Camp de jour, illustré par Camille Maestracci

L’avez-vous remarqué? Sur le dos du livre, les tentacules accrochent la première et dernière lettre du titre! Qu’il soit de face ou de profit, il devrait bien attirer les regards!

Petit bonus pour ceux qui ont pris la peine de venir jusqu’à mon site : le 4e de couverture reprend l’imagerie de la couverture en ajoutant une autre couche de mystère!

Vous pourrez avoir le tout dans vos mains le 23 mai!

Le prix espiègle

Illustration de Jacques Goldstyn pour le prix Espiègle

Cette année, j’ai le grand honneur d’être la porte-parole du prix espiègle, prix décerné par les bibliothécaires scolaires à un livre de grande qualité… et qui pourrait déranger!

J’ai écrit pour eux un texte, que vous pouvez lire sur leur site internet, par ici :

Texte de Annie Bacon pour le prix Espiègle

J’adore ce prix, pour lequel mon livre « De la beauté » a été nommé en 2023. J’aime l’idée d’un prix qui récompense l’audace et le « poussage de limites ». Le fait qu’il soit décerné par un corps de métier sur lequel la pression de la censure peut se faire forte ajoute au plaisir!

Les finalistes de cette année n’ont pas encore été annoncés, le jury est en plein travail! J’ai très hâte d’en découvrir la liste, et je me suis promis de les lire, tous!

En attendant, vous pouvez réserver la date du samedi 5 avril, à 13h30, moment où sera dévoilé les deux lauréats de 2025, à la Librairie L’Intrigue, située au 415 avenue de l’Hôtel-Dieu, Saint-Hyacinthe.

Nouvelle tendance? ¸

Quand tu vois passer un titre, tu te dis que c’est un cas isolé, une prise de risque, un essai.

Lorsque tu en vois passer un second, un an plus tard, chez un éditeur différent, ça devient une tendance.

Une tendance que je ne suis pas certaine d’aimer, mais la critique n’est pas le but de ce billet. Je veux juste souligner l’existence du procédé : utiliser le nom et la signature visuelle d’une propriété intellectuelle ultra-populaire existante pour un livre québécois.

Cas n. 1 :

Cas n.2 :

Droit à la parodie? Brillante stratégie marketing? Plagiat éhonté?

Je vous laisse décider par vous-même.

Les mots soutenus et la théorie schtroumpf

Mes livres ont un vocabulaire soutenu, ce qui pose problème à certains lecteurs. J’en suis consciente, et c’est un choix que j’assume entièrement, je dirais même que ça fait partie de ma signature. En discutant avec ma plus jeune, j’ai développé une nouvelle manière d’expliquer la meilleure manière d’aborder ces mots soutenus avec les jeunes lecteurs. J’appelle le tout « la théorie schtroumpf ».

On a tous déjà lu un album des schtroumpfs. Dans le dialogue, environ un mot sur dix est remplacé par le mot « schtroumpfs » sans ce celui-ci ne soit expliqué. Pourtant, on comprend l’histoire.  Dans l’exemple ci-haut, on comprend très bien ce que veut le Grand Schtroumpf, même si un des mot de sa phrase est incompréhensif.

C’est la même chose pour les mots soutenus. Comparez les deux phrases suivantes :

  • Ils crapahutaient dans la forêt en direction du village
  • Ils schtroumpfaient dans la forêt en direction du village

La même phrase avec le même nombre de mots nous permettant de déduire le sens du verbe mystère. Pourtant, la première phrase fera peur aux jeunes lecteurs, alors que dans la deuxième, ils devineront le sens de la phrase.

La leçon : Il faut faire confiance à la capacité de notre cerveau à combler les trous et ne pas laisser les mots soutenus nous arrêter dans notre lecture.

Évidemment, il y a des limites. Dans la Flute à six Schtroumpfs, lorsque Pirlouit déclare qu’il veut : « schtroumpfer un schtroumpf de schtroumpf », personne ne comprend ce qu’il veut, pas même les schtroumpfs eux-mêmes.

 

C’est pourquoi il est important de lire des livres à sa hauteur (où à sa pointure), ou un peu au-dessus… mais pas trop. Parce que s’il n’est pas important de comprendre chaque mot, il est important de comprendre le sens général de la phrase.

Fin de mon TED Talk!

L’illustratrice de Camp de jour : Camille Maestracci

Lorsque j’ai réalisé, à huit mois de la publication, que l’illustrateur ou illustratrice de Camp de jour n’était toujours pas choisi, je dois l’avouer, j’ai un peu paniqué! Ces pigistes affichent souvent complet des mois et des mois d’avance! Mon éditrice (Marie-Hélène Poitras, pour ne pas la nommer), m’a rapidement rassuré en me proposant Camille Maestracci, qui était libre sur le champ.

Gros coup de cœur pour cette illustratrice française et ses univers imaginaires! Il faut dire que j’adore travailler avec des bédéistes (coucou Boum et Mathieu Benoit) qui ont le don de trouver exactement la bonne expression faciale à mettre selon la situation.

Voici donc quelques illustrations choisies sur ses différents sites… cliquez par ici pour en voir plus sur son compte Instagram :  https://www.instagram.com/camillemaestracci/

Continento-Stratus partie 12 : la révision d’orthographe professionnelle

Image: Muhammad Mahdi Karim

Une fois que le texte est à la satisfaction de l’éditeur (voir direction littéraire), il l’envoie à un réviseur ou réviseure pour la correction d’orthographe. Croyez-moi, vous aurez beau utiliser tous les logiciels de correction du monde, je n’ai jamais vu un manuscrit dans lequel il ne restait pas des fautes à trouver à cette étape.

Pour l’auteur, c’est assez simple : il suffit d’accepter les corrections dans le manuscrit. Après tout, un « s » manquant, ça ne s’argumente pas.

Il arrive parfois, par contre, que des cas particuliers d’orthographe demandent une réflexion plus poussée. Pour Continento-Stratus, j’ai eu un problème de genre pour les fleurs.  Les fleurs étaient définitivement féminines dans leur identité de genre et j’avais donc tout accordé au féminin. Le problème : c’était des dahlias, et le mot « dahlia » est masculin.

La phrase suivante est donc impossible :

— Non! Surtout pas! le réprimande la dahlia d’ondée la plus proche.

Dans ce cas-ci, je me suis inspiré de non-binarité anglophone en mettant tout au pluriel :

— Non! Surtout pas! le réprimandent les dahlias d’ondée les plus proches.

Parfois, la gymnastique a été encore plus compliquée. La phrase suivante :

Les dahlias acclament Philou. Elles applaudissent à toutes feuilles en criant des « bravos » et des « mercis ». Plus jamais elles n’auront peur de la cavalcade. Elles sauront arrêter sa course.

Est devenue :

Les dahlias acclament Philou et applaudissent à toutes feuilles en criant des « bravos » et des « mercis ». Plus jamais ces fleurs n’auront peur de la cavalcade. Elles sauront arrêter sa course.

Ce qui m’a sauvé est que le mot « fleur », lui, est féminin. Une fois ce mot utilisé, je pouvais donc accorder mes pronoms et adjectifs sans mégenrer mes personnages.

Bref, ne pensez jamais que cette étape est ennuyeuse! Les règles de grammaire offrent parfois des défis plutôt stimulants!